La commission mixte paritaire (CMP) qui a réuni hier sept députés et sept sénateurs pour trouver un compromis sur le projet de loi Engagement et proximité a été conclusive : après des pas faits aussi bien par les uns que par les autres, un consensus a été trouvé.
Maire info propose un premier zoom, non exhaustif, sur les principales décisions de la CMP, avec Françoise Gatel et Mathieu Darnaud, rapporteurs du texte au Sénat, et reviendra naturellement sur ce texte dans ses prochains éditions avec le point de vue des députés membres de la CMP.
La sénatrice de l’Ille-et-Vilaine se dit ce matin « particulièrement heureuse que le Parlement, dans un grand esprit de responsabilité, ait pu se mettre d’accord sur un texte qui exprime de la confiance vis-à-vis des élus locaux ». L’ancienne maire de Châteaugiron dit retrouver dans ce texte de compromis « un peu de l’esprit de confiance qui a animé l’adoption de certaines lois récentes, comme celles sur les communes nouvelles, à rebours de l’esprit dogmatique et contraignant des dernières lois territoriales ». Quant à Mathieu Darnaud, (sénateur de l'Ardèche), il ne cache pas non plus sa satisfaction : « Franchement, je ne m’attendais pas à ce que le Sénat obtienne autant ! »
Compétences optionnelles : c’est fini
La principale satisfaction pour le Sénat est la suppression des compétences optionnelles. On se rappelle que l’Assemblée et le gouvernement avaient proposé qu’il ne reste qu’une seule compétence optionnelle. « Cela n’avait pas de sens, juge Françoise Gatel. Il ne reste plus désormais que les compétences obligatoires et les compétences facultatives. » « C’est une véritable avancée en matière de simplification », surenchérit Mathieu Darnaud.
« Notre volonté farouche, poursuit le sénateur de l’Ardèche, ce n’est en aucun cas de combattre l’intercommunalité – au contraire : c’est d’affirmer que dans tous les cas, la porte d’entrée de l’intercommunalité reste la commune. » C’est ce qui a amené les sénateurs à demander – et obtenir en CMP – que le poids des communes au sein des CDCI (commissions départementales de coopération intercommunale) soit porté à 50 % des sièges ; que les pactes de gouvernance des EPCI, en début de mandat, quand ils existent, soient obligatoirement soumis aux conseils municipaux. Ou encore que soit supprimée une limitation du pouvoir d’expression des maires lors de l’adoption du PLUi qui avait été votée à l’Assemblée.
Indemnités : la version Sénat retenue
Les députés ont accepté de revoir leur position sur la question de la hausse des indemnités pour les maires et adjoints. Le gouvernement avait fait adopter par l’Assemblée un système assez complexe, avec une indemnité « garantie » au même niveau qu’aujourd’hui, mais la possibilité, sur demande du maire, de l’augmenter dans les limites d’un barème donné. C’est finalement la version Sénat qui a été retenue en CMP avec le principe d’une revalorisation de droit et non à la demande du maire, sauf si celui-ci décide d’y renoncer. La hausse serait de 50 % pour les communes de moins de 500 habitants, de 30 % entre 500 et 999 habitants, de 20 % entre 1000 et 3499 habitants. « Laisser aux maires la solitude d’une demande d’augmentation des indemnités, c’était un véritable cadeau empoisonné », commente François Gatel. « La nation doit être capable d’affirmer qu’augmenter les indemnités des maires de petites communes procède de la normalité. » Point important : cette évolution entrera en vigueur dès le prochain mandat.
Eau et assainissement : la subdélégation simplifiée
L'avancée est moins nette en revanche pour les sénateurs sur l’eau et l’assainissement – sujet sur lequel, on le sait, le gouvernement et la majorité étaient arcboutés. Le transfert de ces deux compétences restera donc obligatoire au 1er janvier prochain, avec possibilité de report à 2026 dans les communautés de communes. Néanmoins, les deux sénateurs estiment que la CMP a pris des décisions qui vont dans le bon sens – « une solution beaucoup plus favorable pour les communes que ce qui existait dans le texte initial », plaide Mathieu Darnaud. Ce sont les modalités de la subdélégation de ces compétences de l’EPCI vers les communes ou les syndicats qui ont été profondément modifiées. « D’abord, poursuit Mathieu Darnaud, nous avons obtenu que le président de l’EPCI doive inscrire sans délai une demande de subdélégation à l’ordre du jour. » Si l’EPCI refuse cette demande, il devra le faire de façon « réellement motivée ». Enfin, le dossier demandé à une commune qui souhaiterait obtenir une subdélégation a été « très fortement allégé » : « Plan pluriannuel d’investissement, étude d’impact, tout cela disparaît », explique Mathieu Darnaud. La délégation se fera maintenant par une « simple convention ».
Sur la question des compétences à la carte, l'Assemblée est restée sur ses positions. « Le gouvernement parle de faire du sur-mesure, regrette Françoise Gatel, mais il s’est arrêté sur la rive en la matière. On aurait pu aller plus loin. Mais nous avons entendu que la question de la différenciation, et donc des compétences à la carte, reviendrait dans le texte sur la décentralisation, dit 3D, qui sera présenté l’année prochaine. Dont acte. »
Parité : un texte avant la fin 2021
Enfin, sur la question de la parité, un compromis a, là aussi, été trouvé. Rappelons que le gouvernement avait introduit, en fin de débats, un amendement imposant pour 2026 le scrutin de liste paritaire dans les communes de 500 habitants et plus (et non 1000 comme aujourd’hui). Cette mesure a disparu du texte final, et a été remplacée par un engagement à ce qu’un texte soit voté sur cette question avant le 31 décembre 2021. « Nous sommes de farouches partisans de la parité en politique », précise Françoise Gatel, « mais pourquoi se dépêcher de prendre maintenant une décision sur quelque chose qui se produira dans sept ans ? » La sénatrice se réjouit du fait que le Parlement va pouvoir « prendre le temps » de réfléchir à tous les aspects de la question, y compris – ce qui était absent de la proposition initiale – la question de la parité « dans les EPCI et les syndicats ». « Sans compter que cela nous permettra de faire un bilan du résultat des élections de 2020 en la matière ».
Il reste maintenant à attendre la publication de ce texte, qui devrait être voté par l’Assemblée et le Sénat entre le 19 et 20 décembre, pour en connaître tous les détails.
Du côté de l’AMF, François Baroin, ce matin, tout en estimant que ce texte ne peut être « qu’une première étape », salue « le travail du Parlement et son souci d’efficacité pour trouver des solutions ».
Franck Lemarc
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