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Le profil-type du nouveau président de communautés d’agglomération et urbaines

Après les conseillers municipaux, les maires et les délégués communautaires, les présidents des structures intercommunales ont été élus au plus tard le 20 avril 2001. Au vu du poids croissant de l’intercommunalité dans le paysage institutionnel (2000 Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont 90 communautés d’agglomération et 14 communautés urbaines au 1er janvier 2001), de leurs larges domaines de compétences et de leur budget conséquent (celui de la communauté urbaine de Lille est six fois supérieur à celui de la commune de Lille), la compétition pour l’occupation de ces nouveaux postes de pouvoir a fortement mobilisé les élus locaux.

Quel est le profil-type du nouveau président des communautés d’agglomération et urbaines ? Quelles incidences ont eu les lois relatives à la parité et au cumul des mandats sur leur élection ? Comment les élus locaux ont-ils utilisé leur mandat municipal pour accéder à la présidence intercommunale ?

Une "révolution douce" intercommunale ?

A la veille du scrutin, le pourcentage de femmes élues dans les conseils municipaux était de 22% ; une trentaine de femmes dirigeaient alors des communes de plus de 15 000 habitants. Dans un élan d’égalité d’accès aux fonctions électives entre hommes et femmes, la loi du 6 juin 2000 impose aux communes de plus de 3 500 habitants la parité par groupe de 6 élus. Résultat : 47,5% de femmes sont ainsi élues au sein des conseils municipaux de plus de 3 500 habitants. La "révolution douce" dont parle Lionel Jospin a bien eu lieu. Mais, ironie du sort, elles ne dirigent que 44 villes de plus de 15 000 habitants (dont 4 de plus de 100 000 habitants : Fabienne Keller à Strasbourg, Martine Aubry à Lille, Brigitte Le Brethon à Caen et Maryse Joissains-Masini à Aix-en-Provence), la loi n’imposant en rien une parité au sein de l’exécutif ! Les femmes ne représentent que 6,9% des maires, soit 181.
Ainsi, sans contredire la loi, les hommes ont gardé la mairie. Le 4è tour des élections municipales pour l’élection du président des Communautés d’agglomération (CA) et Communautés urbaines (CU) estompe encore plus ces résultats : certes le nombre de "présidentes" double par rapport à la mandature précédente mais aucune CU et seulement 4 CA sont aujourd’hui présidées par des femmes (Marie-Josée Roig à Avignon, Maryse Joissains-Masini à Aix-en-Provence, Brigitte Barèges à Montauban et Marylise Lebranchu à Morlaix), soit 3,8% des 104 communautés d’agglomération et urbaines !

La présidence intercommunale : un enjeu de pouvoir ?

Perçue comme un poste d’influence, comme une position dont le rayonnement dépasse la simple limite communale, la présidence des EPCI est un enjeu de pouvoir, notamment dans les grandes agglomérations, engendrant une compétition politique spécifique entre élus. Depuis la loi du 19 juillet 1999, uniquement les détenteurs d’un mandat municipal (conseiller, adjoint ou maire) peuvent être délégués communautaires et a fortiori président. Dans la mandature précédente, seul Maurice Lombard, sénateur dirigeait la Communauté d’agglomération dijonnaise sans mandat communal. Un conseiller municipal, même d’une commune périphérique, peut devenir président : ce cas représente 8,6% des présidents (1,9% provenant d’une commune périphérique) contre 3,8% dans la mandature précédente. Devenir conseiller municipal pour accéder à la présidence d’un EPCI permet de contourner la loi relative au cumul des mandats puisque seuls les mandats d’exécutifs locaux sont pris en compte. Pour parvenir à la présidence, ces acteurs ont accumulé des ressources politiques sur le terrain local (par leur degré d’ancienneté et d’expérience politique capitalisé grâce à leurs différents mandats locaux successifs) pouvant être renforcées par des expériences dans le champ politique national (parlementaires, ministres). Cet aspect révèle l’intérêt croissant des acteurs politiques à l’enjeu intercommunal et aux ressources politiques qu’ils peuvent en tirer. Malgré la "jurisprudence Jospin" interdisant aux Ministres tout cumul y compris le mandat de président de structures intercommunales, Marylise Lebranchu à Morlaix et Jean Glavany à Tarbes, élus conseillers municipaux, ont respectivement gardé et conquis la présidence de la communauté.

Cette nouvelle donne se fait au détriment de la représentation des adjoints (5,8% en avril 2001 contre 10,6% avant le renouvellement), le pourcentage de maires-présidents d’EPCI demeurant stable (autour de 85%). Donnée invariable : la notion de "centralisme communal" est toujours pertinente pour analyser l’accès à la présidence : environ 77% proviennent de la commune centre contre 23% d’une commune périphérique. Le "ticket gagnant" maire de commune centre – président d’EPCI dont parlent les journalistes semble donc de nouveau fonctionner à plus de 60% des cas pour les CA et CU, ce qui cependant ne sous-entend pas une connivence politique entre la majorité du conseil communautaire et celle de la commune centre, voire entre le président et son conseil communautaire : la CU de Bordeaux se trouve ainsi dans une situation de paralysie depuis l’élection d’Alain Juppé. Le concept de "cohabitation" semble trouver une nouvelle application…

Mandat et Commune d’origine du président d’EPCI, avril 2001.

  Communauté urbaine Communauté d'agglomération Total Mandature précédente
Maire Commune centre 10 56 66 63,5% 65,4%
Commune périphérique 1 22 23 22,1% 19,2%
Adjoint Commune centre 1 5 6 5,8% 8,7%
Commune périphérique 0 0 0 0,0% 1,9%
Conseiller municipal Commune centre 1 6 7 6,7% 1,9%
Commune périphérique 1 1 2 1,9% 1,9%
Pas de mandat local 0 0 0 0% 1,0%

Etre un homme, maire de la commune centre, avec des ressources politiques accumulées dans l’espace politique local voire national est toujours le profil idéal-type pour conquérir la présidence d’EPCI. Le taux moyen de renouvellement des présidents des communautés d’agglomération et urbaines s’élève à 45,2%, chiffre s’expliquant davantage par les nombreux basculements politiques des agglomérations que par les effets des lois supposées modifier indirectement le profil-type du président d’EPCI.

Référence : BW7721
Date : 15 Avr 2002


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