Espace Associations départementales


Discours de clôture prononcé par Jacques Pélissard, président de l’Association des maires de France, aux 9èmes assises nationales des déchets à Agen du 27 au 29 juin 2006

Mesdames, Messieurs,

Je suis heureux d’être ici à Agen en cette 9ème édition des Assises pour clôturer avec les plus courageux d’entre vous deux journées et demie de confrontation d’expériences, de foisonnement d’idées novatrices, de débats,

dans le contexte d’une actualité déchets particulièrement chargée.

Ici même, dans cette même salle, à la même période mais il y a quatre ans (cela nous rajeunit tous !), j’avais présenté au nom de l’AMF 12 propositions pour une meilleure gestion des déchets.

Quatre ans plus tard, et ce résultat démontre la force de notre engagement collectif :

la plupart de ces propositions, et particulièrement celles dont le contenu était essentiel sont maintenant réalité ou vont être opérationnelles dans les mois à venir.

Les DEEE

 
A l’époque, en 2002, nous parlions des produits électriques et électroniques en fin de vie (PEEFV).

Il s’agit désormais de DEEE, terminologie consacrée par le décret du 20 juillet 2005.

Ce décret était cependant insuffisant sur le registre de la compensation au profit des collectivités locales de leurs coûts de collecte sélective.

Il a donc été nécessaire de bien affirmer ce principe tandis que pour sa part, le traitement des DEEE, clairement mis à la charge de la filière par la réglementation, n’a jamais nécessité de précision textuelle.

C’est donc après négociation avec la profession que par la loi de finances rectificative pour 2005, nous avons cadré le dispositif :

en affirmant le principe de compensation,

en prévoyant en accord avec la profession la « visible fee », c’est-à-dire la mention visible du coût de recyclage affiché sur l’étiquette du produit neuf lors de sa mise sur le marché.

Le cadre étant posé, il a fallu négocier le projet de barème DEEE.

Aussi je tiens à remercier les représentants des collectivités locales qui ont participé à l’élaboration de ce projet et notamment Michel Bourgain, Paul Deffontaine, Sylviane Oberlé, déléguée générale du CNR et Nicolas Garnier, délégué général d’Amorce.

Le projet a été avalisé par le Bureau de l’AMF le 28 juin et sera soumis au Comité des Finances locales le 5 juillet.

Ce barème national et unique repose sur une structure binôme de soutien :

- une partie fixe indépendante des tonnes collectées,

- une partie variable fonction des quantités triées.

Il tient compte également des contraintes de milieu (caractère urbain ou rural de la collectivité) et des modes de collecte.

Il comporte enfin un soutien à la communication.

Concrètement, une collectivité affectant une surface de quelques dizaine de mètres carrés dans sa(ses) déchetterie(s) pourra bénéficier :

- de 1 560 € de soutien forfaitaire au titre de la partie fixe pour chaque déchetterie,

- de 1 000 € au titre de l’accueil sélectif des lampes et néons par collectivité contractante avec l’éco-organisme dédié aux lampes usagées.

Viendront s’y ajouter :

- au titre de la partie variable, un soutien de 20 à 65 €/tonne de DEEE en fonction des quantités enlevées et du rythme d’enlèvement, porté à 81 € la tonne pour les collectivités éligibles à la majoration urbaine,

- un soutien à la communication dégressif de 0,20 €/habitant desservi,

- une participation à l’investissement de 700 € maximum par déchetterie pour l’achat d’une armoire à DMS dans laquelle lampes et néons pourront être stockés à l’abri des intempéries dans l’attente de leurs enlèvements.

Reste cependant toujours en débat la question du financement de la sécurité dans les déchetteries.

Le soutien versé aux collectivités au titre de ce barème DEEE devrait être de l’ordre de 20 millions d’euros/an.

Les INS

Là aussi, nous avons vécu un changement sémantique.

A l’époque, nous parlions de COUNAS.

Là encore, il s’est agi d’engager un long combat pour assurer le financement de ces déchets qui représentent 40 kg/an/ménage.

En effet, dès octobre 1999, Mme Parly, alors secrétaire d’Etat au Budget s’était engagée à proposer un projet de décret. Ce projet restera lettre morte.

Le combat s’est ensuite porté sur le terrain législatif :

- loi de finances 2003,

- loi de finances rectificative en 2004,

- loi de régulation postale en mai 2005.

Le décret, bien cadré, sortira finalement en mars 2006.

Sont concernés :

- tous les journaux de petites annonces,

- toutes les publicités des grandes surfaces,

- avec un seuil d’exonération de 2 500 kilogrammes, notamment pour que les collectivités de taille modeste ne contribuent pas.

Un éco-organisme dédié devrait bientôt être mis en place. Par ailleurs, un projet de barème est en négociation avancée.

Il veille dans ses principes à ne pas perturber le système actuel de récupération des journaux, revues, magazines.Il prévoit par ailleurs des soutiens différenciés.

Le barème comprendrait ainsi plusieurs niveaux :

- un soutien à la valorisation matières/recyclage de 65 €/tonne,

- un soutien à la valorisation énergétique qui reste en négociation (entre 25 € et 30 € la tonne),

La question d’un palier bas pour le stockage en centre d’enfouissement technique ISO 14001 ou EMAS reste posée.

Le soutien versé aux collectivités au titre de ce barème INS devrait être supérieur à 20 millions d’euros/an.

Le caractère très incitatif de ces barèmes vise à étendre le champ des collectes sélectives, permettre des économies de ressources d’origines fossiles, et de lutter contre le réchauffement climatique.

La négociation des barèmes est pratiquement bouclée. Les éco-organismes de chacune des filières devront être agréés afin que les filières soient opérationnelles d’ici fin 2006 et que les soutiens aux collectivités soient versés tout début 2007.

Il nous faudra par ailleurs arbitrer et choisir la formule de coordination des éco-organismes DEEE.

Les textiles

Près de 600 000 tonnes/an de textiles sont mises sur le marché/an en France. Au regard de l’évolution rapide de la mode, ces produits sont jetés. Or, la baisse de qualité et la baisse des prix ont rendu plus difficile leur recyclage.

Nous avons de plus en plus affaire à des textiles jetables et ces textiles délaissés comme « fripes » se retrouvent dans les déchets municipaux.

Aussi, la nécessité d’accompagner la filière, de solvabiliser par un prix de soutien les activités qui ne sont pas économiquement équilibrées s’est imposée. Je pense aux produits d’essuyage, d’effilochage qui présentent des atouts environnementaux en terme d’isolation thermique et phonique, et aux produits qui représentent un coût net pour les entreprises et les collectivités locales (traitement thermique ou enfouissement).

Le ministre délégué au Budget m’a chargé d’une mission.

Après concertation intense, je lui remettrai très prochainement mon rapport prévoyant la déclinaison du principe d’internalisation, la mise en place d’un éco-organisme, d’un cahier des charges, d’un agrément des entreprises pour garantir un traitement local, ainsi qu’un barème de soutien (à élaborer avec le nécessaire relais des collectivités locales).

Nous le voyons, 2006 aura été l’année des filières dédiées.

Avancées sur le mode de financement du service public des déchets

Là aussi, c’était une des 12 propositions 2002. Nous avons bien cheminé !

Rappelons-nous : la loi de juillet 1999 sur l’intercommunalité a prévu le principe de l’unification des taux de TEOM à l’intérieur du périmètre des syndicats de collecte.

Le principe paraissait séduisant par l’égalité de traitement financier qu’il supposait.

Or, trois lois de finances votées par deux majorités différentes ont du reporter l’application de ce principe qui conduisait à des résultats fiscaux extravagants, compte tenu de la très forte hétérogénéité des bases locatives qui n’ont pas été révisées depuis 1970 !

La loi de finances pour 2005 a trouvé des palliatifs pour la TEOM :

- lissage de l’unification des taux,

- possibilité de plafonnement des valeurs locatives dans la limite d’un montant qui ne peut être inférieur à deux fois le montant de la valeur locative moyenne communale,

- possibilité de proportionner à l’intérieur des zones de perception le montant de la taxe à l’importance du service rendu.

Reste encore pour l’AMF à obtenir la baisse du pourcentage (8%) retenu sur le produit de la TEOM par les services du Trésor pour recouvrer cette taxe.

Pour sa part, la loi de finances rectificative pour 2005 a apporté des modifications à la REOM :

- procédure de recouvrement «opposition à tiers détenteur »,

- tarification binôme de la redevance (possibilité de mettre en place une part fixe et une partie variable).

Poursuivre dans la voie d’une meilleure gestion et d’une approche globale des déchets

La meilleure gestion implique :

- de renforcer la complémentarité des filières et notamment de mettre en valeur les atouts de chacune d’entre elles :

- le recyclage matière, la valorisation organique des boues/du compost,
- le réemploi ; recyclerie, ressourceries, secteur social, (théorie des 3 R : réduire, recycler, réutiliser),
- le traitement thermique : l’AMF a œuvré pour l’adoption d’un amendement qui réduit la TVA pour l’abonnement et la consommation sur la fourniture de chaleur lorsqu'elle est produite au moins à 60 % à partir notamment des déchets, d’énergie de récupération, de biomasse, de géothermie…,
- la méthanisation (hausse du tarif de biogaz issu de méthanisation à 0,14 € maximum /kWh),
- l’enfouissement (hausse du tarif de rachat du biogaz de CSDU qui passe à 0,12 € maximum/kWh).
- de poursuivre l’essor de l’intercommunalité, qui présente entre autres l’avantage d’avoir un effet levier sur les économies d’échelles, sur le dimensionnement et la rentabilité des infrastructures de tri, d’enfouissement…
 
- d’optimiser la planification (révision des PDED),
 

- d’optimiser les tournées de collecte.

Permettre une meilleure acceptabilité des dispositifs de traitement

Concertation, information, communication sont nécessaires tout au long du cycle de vie des déchets.

Il s’agit d’une impérieuse nécessité pour restaurer la confiance. Cette perte de confiance nous interpelle. Elle se cristallise notamment sur la question de la mise en fonctionnement de nouvelles installations de traitement de déchets et notamment les incinérateurs.

Ce manque de confiance est d’autant plus paradoxal que l’évolution des technologies et les nouvelles contraintes européennes ont contribué à rendre les installations beaucoup plus respectueuses de l’environnement.

a) aide aux communes d’accueil

L’AMF a ainsi été amenée à proposer dans la loi de finances pour 2006 un amendement permettant aux communes d’accueil d’un incinérateur ou d’un centre d’enfouissement de classe 2 de lever une taxe de 3 € maximum la tonne entrante. Sa portée a néanmoins été réduite par un amendement sénatorial aux seuls équipements installés/mis en service à compter du 1er janvier 2006. L’AMF tentera dans les prochaines semaines de revenir à l’esprit initial du dispositif pour permettre aux communes d’accueil de tels équipements, indépendamment de leur date de mise en service/mise aux normes, de pouvoir lever cette taxe.

b) renforcement de la transparence et de l’information des concitoyens (une des 12 mesures de 2002)

- désormais, un état spécial doit être annexé aux documents budgétaires pour les communes et groupements de plus de 9 999 habitants qui ont institué la TEOM,

- l’aide aux ambassadeurs du tri a été portée à 10 000 €, le cumul de cette aide avec le dispositif Borloo (Contrats d’accompagnement à l’emploi et contrats d’avenir) étant possible depuis le 31 mai 2006, (partenariat, MEDD, Ministère Emploi, MEDD, AMF, Eco-Emballages et Rudologia),

- des indicateurs de performance, c’est-à-dire de données synthétiques sur les déchets ont été mis en place avec l’IGD. Ces indicateurs pourront à terme venir enrichir le contenu du rapport annuel du maire et le fonctionnement du service public de gestion des ordures ménagères.

Mesdames, Messieurs,

Ensemble au fil des années, grâce aux réflexions collectives conduites à Agen et à la Baule, grâce à l’implication d’élus de terrain, Gérard, Paul , Camille , Gilles, Franck, avant-garde d’une longue théorie de maires passionnés par les problématiques environnementales, grâce à l’action cohérente et globale organisée par l’AMF, grâce au partenariat mutuellement exigeant avec les branches industrielles, les éco-organismes et les associations,

nous avons imaginé un modèle innovant où le rôle central d’ensemblier du dispositif des collectivités est affirmé, où les financements sont partenariaux, un modèle qui implique et responsabilise les citoyens-consommateurs-contribuables à l’égard desquels nous devons garantir toujours plus d’informations, de transparence, et de participation, un modèle adapté à la diversité de nos territoires, au volontarisme des élus locaux, un modèle prenant en compte dans sa dimension opérationnelle l’intercommunalité qui permet de rationaliser la dépense publique dont nous sommes comptables vis-à-vis de nos concitoyens.

Ce modèle, il nous faudra le compléter s’agissant de la gestion et du financement des DASRI, des déchets toxiques, des déchets organiques mais aussi en renforçant la prévention.

Ce modèle, il nous faut continuer à l’édifier tous ensemble, par notre volonté collective, notre intelligence, notre courage collectif sur des fondations durables.

 

Je vous remercie de votre attention.

Référence : BW8084
Date : 24 Juin 2006
Auteur : Jacques Pélissard, président de l'AMF


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