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Assurance des collectivités : une première pierre à la nécessaire réforme

C’est une première étape, sur un sujet extrêmement sensible pour les collectivités, dont beaucoup rencontrent de considérables difficultés pour s’assurer depuis plusieurs années. La question des franchises est, notamment, un point particulièrement problématique – certains assureurs faisant exploser les montants des franchises, unilatéralement. Cas emblématique : celui du maire de Rives-de-Gier (Loire) qui, après les inondations de novembre dernier, s’est vu appliquer par son assureur une franchise de … 2,5 millions d’euros. Autant dire que dans ce cas, on ne voit pas bien l’intérêt d’avoir une assurance – ce qui est probablement le but recherché par les assureurs, qui estiment la rentabilité de ces contrats peu intéressante.

Franchise à 10 %

Le décret paru hier modifie les règles de calcul des franchises applicables aux collectivités en matière de catastrophes naturelles. Jusqu’à présent, le montant de cette franchise était égal « au montant le plus élevé figurant au contrat » (article D125-5-7) du Code des assurances.

Le décret modifie ces dispositions : la franchise sera désormais égale « à une fraction du montant des dommages matériels directs avec un montant minimum fixé librement », cette fraction étant définie par arrêté, tout comme le montant « minimum », qui « ne peut être inférieur à un seuil fixé par arrêté selon la nature du phénomène ». La nouvelle rédaction de cet article précise également que « l’assureur peut proposer une réduction de franchise pour tenir compte du comportement des assurés ». 

Une nuance est apportée pour les communes et EPCI de moins de 2 000 habitants : pour eux, « le montant de la franchise ne peut excéder un montant fixé par arrêté ». 

L’arrêté publié le même jour fixe les fractions et montants minimum. La franchise – toujours pour les dégâts consécutifs à une catastrophe naturelle – sera égale à « 10 % du montant des dommages matériels directs non assurables subis par l'assuré, par établissement et par évènement ». Elle ne pourra être inférieure à un montant de 1 140 euros, sauf pour les dommages liés aux mouvements de sécheresse-réhydratation des sols : dans ce cas, le montant minimum de la franchise sera de 3 050 euros. 

En résumé : le montant de la franchise doit désormais être compris entre 1 140 euros (ou 3 050 pour le retrait/gonflement des sols) et 10 % du montant des dégâts. Pour les communes et EPCI de moins de 2 000 habitants, le montant de la franchise est plafonné à 100 000 euros – pour les autres, il n'y a pas de plafond en dehors de la limite des 10 %.

Pourquoi le seuil a-t-il été fixé à 2 000 habitants ? Ce chiffre n’a, en tout cas, jamais été concerté avec les associations d’élus, Bercy se contentant d’indiquer qu’il était issu de simulations menées avec la Caisse centrale de réassurance. Il y a tout lieu de penser que ce seuil a été calculé selon des critères de rentabilité pour les assureurs et non en fonction des intérêts des collectivités concernées. La commune de RIves-de-Gier, dont nous parlions plus haut, avec ses 15 400 habitants, n'aurait pas été concernée par le plafond.

Enfin, comme prévu dans le décret, l’assureur peut consentir une réduction de franchise si la collectivité assurée « peut démontrer la mise en œuvre de mesures de prévention des risques » de catastrophe naturelle. Cette réduction ne peut toutefois pas conduire à passer sous la limite des 1 140 ou 3 050 euros, qui restent des planchers obligatoires. 

Modulation de franchise

Le décret modifie également les règles concernant la modulation de la franchise dans les communes soumises plusieurs fois de suite aux mêmes aléas. 

Jusqu’à maintenant, les règles étaient les suivantes : dans une commune non dotée d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN), la franchise appliquée aux biens de la collectivité était modulée à la hausse au fil des catastrophes. La franchise était appliquée lors du premier et du deuxième aléa, puis doublée lors du troisième, triplée après le quatrième et quadruplée lors du cinquième et du suivant. 

Cette règle est, depuis longtemps, décriée par les associations d’élus pour son caractère particulièrement injuste : la prescription et l’élaboration d’un PPRN ne relevant pas de la commune mais du préfet, les communes étaient lourdement punies … pour un manquement de l’État. 

Une première modification de ce dispositif est intervenue en décembre 2022 : à partir de cette date, le mécanisme de modulation de la franchise ne s’appliquait plus dès lors qu’un PPRN était prescrit, et ne reprenait que si la prescription n’avait pas abouti à une approbation dans un délai de quatre ans. 

La nouvelle rédaction prévue par le décret adoucit un peu la sanction – sans toutefois la supprimer – et modifie les règles ; le délai pour aboutir à une approbation passe de quatre ans à quatre ans et demi. Et même si le texte n’est pas extrêmement clair, il semble qu’il soit prévu qu’à partir du troisième aléa, la franchise sera doublée, et qu’il n’y aura plus de triplement ni de quadruplement de la franchise.

La parution de ce décret est un premier pas dans la réforme, tant attendue, des conditions d’assurance des collectivités. Il reste encore beaucoup de travail, notamment pour avancer vers la mutualisation d’un certain nombre de risques, comme le risque émeutes, qui pourrait à l’avenir faire l’objet d’un dispositif comparable à celui en vigueur pour les catastrophes naturelles. 

Franck Lemarc pour Maire-info, article paru le 4 juillet 2025.


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Référence : BW42700
Date : 4 Juil 2025
Auteur : Maire-Info


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