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Compte-rendu de la Commission Culture du 25 janvier 2006.

 Cette réunion a porté principalement sur le cinéma, et plus particulièrement les salles de projection : point sur la situation, rôle des communes dans ce domaine, état des difficultés, aides apportées à différents niveaux.

 I – Les communes et le cinéma

 Jacques GUENEE, Directeur de Territoires et cinéma, a rappelé le contexte des années 80 dans lequel les communes se sont investies dans le domaine de la cinématographie, au moment où de nombreuses salles de cinéma ont du fermer leurs portes. Cette crainte de voir disparaître du paysage français bon nombre de salles de cinéma a ainsi poussé un nombre croissant de communes à les soutenir voire à les municipaliser.

 Depuis, de nombreuses collectivités locales ont compris l’intérêt qu’elles avaient à soutenir ou à maintenir des cinémas sur leur territoire, y compris et c’est un phénomène récent les régions qui s’investissent notamment dans la production. Les études démontrent en effet que le cinéma constitue, en dépit de son déclin, la première activité culturelle des français avec 200 millions de spectateurs pour l’année 2005, loin devant les musées qui réunissent 50 millions de visiteurs, dont de nombreux étrangers. Etant des lieux d’échanges et de convivialité, les salles de cinéma exercent  de plus un effet d’attraction économique non négligeable sur les territoires.

 Aujourd’hui, Jacques GUENEE estime qu’environ 1/3 des cinémas français sont municipalisés, c’est-à-dire gérés par des communes ou subventionnés par celles-ci, représentant 1/5 des écrans français.

Toutefois, le cinéma doit faire face actuellement à plusieurs difficultés :

1 - la déconcentration des services de l’Etat : si la taxe sur les salles de cinéma était abandonnée ou régionalisée, l’équilibre actuel entre les régions à forte ou à faible activité pourrait être remis en cause ;

2 - le risque d’un désengagement des élus du fait de l’absence de définition de leur rôle et responsabilité vis à vis des professionnels en matière de cinéma ;

 3 - la numérisation à venir des équipements : Ce phénomène inévitable va avoir des conséquences importantes en termes d’exploitation, de coûts des copies et d’expédition, de coûts de maintenance. Pour autant, la lourdeur initiale de nouveaux équipements devrait permettre une diffusion beaucoup plus large des films et à terme une baisse des coûts d’exploitation. La période transitoire sera en revanche plus difficile notamment pour les petites communes.

 François HURARD, Directeur du cinéma au CNC, a également souligné combien la place des élus locaux dans le domaine du cinéma est conséquente, ce qui a permis sans conteste le maintien de petites salles dans des territoires parfois isolés. Il a indiqué que la France constitue le premier réseau européen d’offre en matière de salles de cinéma (5 300 salles, 1 million de fauteuils, 1 100 établissements) et le quatrième réseau mondial derrière la Chine, l’Inde et les Etats-Unis.

Le système d’aide français est orienté, contrairement à d’autres pays européens, vers l’ensemble de la filière du cinéma : production, exploitation, diffusion.

Quatre taxes ont été instituées, représentant 250 millions d’euros annuel dont 78 millions affectés à l’exploitation : une taxe de 11 % prélevée sur le prix du billet, une taxe de 5,5 % sur l’exploitation en matière de télévision, une taxe sur l’édition de la vidéo et une dernière plus récente sur le cinéma en ligne.

Par ailleurs, deux formes de soutien sont principalement proposées :

1 - le soutien automatique : il s’agit d’un compte d’investissement au CNC que les exploitants de salles peuvent mobiliser pour des créations de salles ou de modernisation. L’enveloppe annuelle est de 56 millions d’euros. Il s’avère que, dans la pratique, les petites communes ont un taux de retour sur investissement bien plus important que les multiplex : 80 % contre 30 %.

2 - les aides sélectives pouvant concerner tant l’investissement que le fonctionnement :

  • à l’investissement afin de compléter les travaux de création, de modernisation et d’extension : 10 millions d’euros par an, la moitié du parc français en a bénéficié en l’espace de 10 ans, ce qui est un signe de vitalité mais qui ne doit pas cacher de très fortes inégalités selon les régions en terme d’investissement des collectivités.
    au fonctionnement : l’Association française de cinéma aide au tirage de copies dans des zones caractérisées par une absence totale de distributeurs et le CNC dispose d’une ligne budgétaire de 10 millions d’euros pour le cinéma d’art et essai.
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Si le système de soutien de l’Etat français au cinéma est conséquent, il n’en demeure pas moins que le cinéma doit affronter un certain nombre de difficultés selon François HURARD, notamment la hausse très sensible du nombre de films qui pourrait avoir des effets pervers sur la diffusion, et des problèmes de régulation de la concurrence qui en découlent. De même, il s’interroge sur la possibilité d’établir un modèle économique à la française pour préserver les équilibres entre les petites et les grandes exploitations ainsi que la diversité des films avec l’avènement du numérique. La modernisation actuelle s’effectue surtout auprès des régions, l’Etat versant un euro lorsque la région en investit deux.

Michel PLAZANET, Chef de service de l’action territoriale au CNC, a pour sa part indiqué que le CNC mène une politique conventionnelle avec les collectivités territoriales pour les accompagner en particulier dans des actions d’éducation artistique et dans la production de courts métrages.

En 2004, des conventions tripartites (CNC – DRAC – Régions) et triennales ont été signées avec les régions (24 conventions en 2005), avec pour but de rendre plus lisibles les dispositifs d’aides et de financements. Les conventions peuvent prévoir des aides à la création, de développement des projets des courts et longs métrages et à l’éducation artistique (50 % des régions).

L’enveloppe 2005 d’un montant de 61 millions d’euros se répartit de la manière suivante : 44 millions pour les régions, 12 millions pour le CNC et 5 millions pour les DRAC.

Quelques conventions ont également été signées avec des départements voire même avec la communauté urbaine de Strasbourg.

Débat avec la salle

André LAIGNEL, Président de la commission Culture et maire de ISSOUDUN : si le cinéma a subi de fortes mutations avec la montée en puissance de la télévision, d’autres mutations inévitables pourraient avoir des effets négatifs sur la culture française, notamment avec la numérisation. Il s’est également interrogé sur le nombre de salles commerciales qui seraient en danger à défaut de relais publics : 60 % selon François HURARD, ce qui est révélateur du poids des collectivités.

Anne-Bernade SEGUELA, conseillère municipale en charge du cinéma à TOULOUSE, se demandait où se trouvait la limite entre le soutien et le risque de soutien abusif.

François HURARD a indiqué qu’un guide relatif au statut des salles de cinéma présentant les différentes actions possibles des communes est en cours d’élaboration.

André DRAPEAU, Maire de LA JAUDONNIERE, a posé la question des mesures pédagogiques ou de fonctionnement que distribue le CNC pour aider une salle en difficulté.

François HURARD rappelle qu’une subvention arts et essai est possible, Michel PLAZANETindiquant que des salles à vocation spécifique peuvent aussi faire l’objet d’une aide de la part des DRAC.

Annie GENEVARD, Maire de MORTEAU, estime que les communes ont besoin d’être éclairées sur les démarches à entreprendre pour aider une salle en difficulté.

Ce à quoi François HURAD a répondu que l’Agence régionale de développement du cinéma peut aussi intervenir tout en reconnaissant  la nécessité de développer un système de conseil approprié.

Gérard BAUMEL, Rapporteur de la commission et Maire de CERESTE, souhaitait connaître les différentes aides proposées à la production audiovisuelle notamment afin d’éviter de passer par des chaînes nationales pour des documentaires.

Les aides étant ouvertes aux chaînes locales, François HURARD a précisé que des fonds régionaux plus adéquats existaient.

Catherine GODBARGE, Maire-adjoint à VIRE, souhaitait savoir combien de cinémas étaient gérés en régie directe.  Ú Un seul exemple de régie directe à Saint-Cloud d’après François HURARD.

André LAIGNEL a souligné pour sa part que l’EPCC pouvait constituer un instrument pertinent, l’exemple d’Issoudun l’illustre.

Catherine MORIN-DESSAILLY, Sénatrice et maire-adjointe à Rouen, tout en reconnaissant les impacts des multiplex sur les salles art et essai, a fait remarquer qu’une population cinéphile fréquentera autant les uns que les autres, qu’il s’agit essentiellement d’une question d’aménagement du territoire.

François HURARD considère que le système d’encadrement à la française a permis de préserver les cinémas indépendants et leur coexistence avec les multiplex, les incitant même à se moderniser et à proposer une programmation complémentaire. Toutefois, en cas de problèmes liés à des agrandissements de multiplex, à leur suréquipement, à la diffusion de films art et essai, des solutions peuvent être trouvées auprès du médiateur.

Jacques GUENEE a estimé quant à lui que la politique des cartes d’abonnement n’ouvrant l’accès qu’à certaines salles posait également difficulté.

André LAIGNEL considère au contraire que l’avènement des multiplex a eu des effets très négatifs sur les salles indépendantes situées dans des zones rurales proches ou de petites villes alentours, n’encourageant pas celles-ci à investir et laissant comme seul recours une intervention de la collectivité.

Anne-Bernade SEGUELA a rappelé combien un cinéma art et essai municipalisé pouvait mettre à mal un autre cinéma indépendant privé ne bénéficiant lui d’aucune aide. Quels sont critères pour bénéficier d’une aide ?

A la question de Paul LADEVIE, Maire de VILLIERS sur LOIR, sur la multiplication des multiplex parfois sur un même territoire, François HURARD estime qu’il s’agit là d’une interrogation importante même s’il existe encore en France un potentiel de développement dans certaines zones.

Lucien DUPERREY, Maire de ST ANTONIN sur BAYON, a rappelé que des salles de cinéma situées en centre-ville perdent leur fréquentation au profit de salles placées en périphérique en raison de l’absence de parkings et d’actes de vandalisme, et que la question de la sécurité mérite ainsi d’être posée.

Annie GENEVARD a pour sa part souligné l’importance de favoriser des projets de création de salles dans les centre-villes compte tenu de leurs apports en terme d’activité économique.

Enfin, Catherine MORIN-DESSAILLY a souhaité connaître la décomposition du ticket d’entrée.

Réponse : 40 % pour l’exploitant, 40 % pour la distribution, 11 % de taxes, 5,25 % de TVA et 1,27 % de taxe SACEM (5,80 € prix moyen d’un ticket en France).

André LAIGNEL, tout en reconnaissant que le cinéma reste le moins cher des loisirs culturels, pointe néanmoins du doigt les écarts de prix considérables qui sont pratiqués selon les régions et le degré de monopole des salles. 

II – Points d’information

André LAIGNEL a fait un point sur l’évolution de deux dossiers d’actualité (voir notes distribuées lors de la séance) :  

  • Le régime d’assurance sociale des intermittents du spectacle : il est important selon André LAIGNEL que l’AMF rappelle que la proposition de loi, signée par 477 parlementaires de tous bords, soit inscrite à l’Assemblée Nationale. Il convient donc que le Bureau de l’AMF soit saisi de cette question.

  • L’examen au parlement du projet de loi sur les droits d’auteur et les droits voisins : le dépôt des amendements sur les bibliothèques élaborés en collaboration ave la FNCC et l’inter association des bibliothécaires doivent être maintenu et soutenu. La rediscussion du projet de loi à l’Assemblée Nationale est annoncée pour le mois de mars. L’AMF restera très attentive.
Référence : BW6667
Date : 22 Mars 2006
Auteur : Sébastien Ferriby


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