Dès l’ouverture des discussions sur les missions de directeurs généraux de services lors de l’examen de loi de Transformation de la fonction publique en 2019, l’AMF, sollicitée par le ministre, et soucieuse d’ouvrir plus largement le débat à l’ensemble des employeurs qu’elle représente dans leur diversité, s’est emparée de la question non seulement des emplois de direction des communes de plus de 2000 habitants mais également de celles en deçà de ce seuil.
En effet, mesurant l’importance de cette question et des attentes qu’elle suscite, la Commission FPT et RH a consacré un groupe de travail dédié en son sein, animé par Madame Murielle Fabre, co-présidente de la Commission FPT et RH, maire de Lampertheim et vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg. Il s’est réuni plusieurs fois depuis le mois de mai 2021, a mené plusieurs auditions (associations départementales, opérateurs CNFPT et FNCDG, syndicats, AMRF …) et a partagé ses réflexions avec la CCTR.
Le groupe de travail a très vite pris conscience des difficultés que la grande majorité des élus ruraux rencontraient pour s’entourer de leurs collaborateurs directs que sont les secrétaires de mairie.
Le constat partagé fait montre d’un métier tendu, où le recrutement est difficile, avec des prévisions à moyen terme de forts départs en retraite ; des difficultés du poste liées à la polyvalence de la fonction, au peu de lisibilité de leurs missions et à l’absence d’un cadre commun. A cela s’ajoutent des situations particulières : les agents multi-employeurs, à temps non complet, la spécificité du métier compte tenu de la collaboration étroite avec le maire ; le travail quasi isolé, les difficultés liées aux absences pour formation.
Ceci, renforcé par une méconnaissance du métier par tous a conduit à la dévalorisation de ce métier indispensable pour les communes rurales et à un manque cruel d’attractivité qui laisse de nombreux élus dépourvus.
Propositions de l’AMF
L’AMF formule 26 propositions énoncées ci-dessous qui balayent six champs d’intervention dans lesquels il est impératif d’agir concomitamment pour apporter aux quelques 29 606 communes concernées des réponses à des éléments tant structurels que conjoncturels mais aussi à des situations de tensions territorialement diverses et disparates.
Dispositions statutaires
Selon le niveau de recrutement de l’agent, les responsabilités liées au poste de secrétaire de mairie seront plus ou moins étendues. Compte tenu de l’hétérogénéité des recrutements statutaires (A, B, C, titulaires/contractuels), l’AMF considère que ces possibilités de recrutement soient maintenues, avec cependant une nuance pour le recrutement d’agents de catégorie C en bas de grille.
Il apparait pour l’AMF que la pertinence de ces fonctions reste incontestable pour les communes de moins de 2000 habitants mais est aussi une opportunité pour les communes de plus de 2000 habitants qui ne créent pas d’emploi fonctionnel de DGS.
Proposition n°1
L’AMF propose d’ouvrir un « statut d’emploi » aux fonctions de secrétaires de mairie avec des grilles indiciaires propres, à l’instar des grilles indiciaires ouvertes aux agents exerçant les fonctions de DGS. L’AMF propose donc pour les fonctionnaires la création d’un statut d’emploi, qui comprendrait deux grilles indiciaires (C+/B et B+/A).
Proposition n°2
L’AMF propose d’élargir la dérogation offerte aux communes (proposition déjà émise lors des négociations de la loi TFP) de moins de 1000 habitants aux communes de 1000 à 2000 habitants de pouvoir recourir au recrutement contractuel pour ce statut d’emploi dans des conditions clairement définies, notamment dans le cas d’un recrutement infructueux d’un titulaire.
Les situations d’emploi
L’AMF appelle à la vigilance sur la situation des secrétaires de mairie intercommunaux ou ayant plusieurs employeurs.
La mutualisation est une des pistes pour pallier les difficultés de recrutement et de gestion rencontrées par les élus sur ce métier. Toutefois elle rappelle le risque d’une perte potentielle du lien hiérarchique du maire.
Proposition n°3
L’AMF préconise un dispositif, type groupement d’employeurs pour l’emploi des secrétaires de mairie, de préférence à un transfert de compétences vers un EPCI, ou à une gestion totalement déléguée aux CDG. Ces deux solutions risquent à terme de faire perdre au maire son rôle d’employeur public.
Proposition n°4
L’AMF préconise également la mise en place d’outils métiers partagés, à l’échelle de la coordination des employeurs, afin de faciliter l’utilisation et la formation des outils informatiques. Il s’agit de privilégier par exemple un seul logiciel de paye, urbanisme, état-civil pour les employeurs d’un même agent exerçant les fonctions de secrétaire de mairie.
Les missions
L’AMF rappelle ici l’importance du lien de confiance étroit entre l’élu et son collaborateur direct en la personne du secrétaire de mairie. De cette fonction pivot découlent des missions extrêmement polyvalentes mais aussi spécifiques à certaines situations géographiques (montagne, littorale…), économiques (touristique, agence postale communale…) ou encore liées à l’émergence des communes nouvelles.
L’AMF constate également une forte évolution normative induisant une technicité accrue pour les secrétaires de mairie.
Proposition n°5
L’AMF préconise un dispositif particulier en cas de changement de municipalité pour assurer la continuité du service public et/ou éviter la rupture de loyauté, attendue sur ces fonctions bien particulières. L’AMF suggère, pour assurer la continuité du service, de permettre à la collectivité d’origine de disposer de droit de la collectivité d’accueil des services du secrétaire de mairie durant les 6 mois qui suivent la radiation des cadres de l’agent dans la limite de 20% de son temps de travail, par le biais d’une convention de mise à disposition spécifique. L’AMF recommande par ailleurs qu’en cas de perte de confiance majeure et motivée, l’employeur puisse, sous certaines conditions, placer le secrétaire de mairie en surnombre dans l’attente d’une solution de mobilité.
Proposition n°6
L’AMF propose d’ouvrir une délégation de signature aux secrétaires de mairie, à l’instar de celles existantes pour les directeurs généraux des services, dont l’expertise est reconnue, en fonction du niveau de responsabilité et dans un souci de continuité des services. En corollaire il s’agit d’ouvrir également pour l’agent délégué les mêmes garanties assurantielles que celles ouvertes aux DGS.
L’appellation
Sans rappeler l’historique étymologique liée aux secrétaires de mairie, et dans un souci de renforcer l’attractivité et la réalité professionnelle, force est de constater que le terme actuellement usité n’est plus adapté.
Proposition n°7
L’AMF invite à modifier l’appellation « secrétaire de mairie » et fait les propositions suivantes :
- Directeur/trice des services
- Responsable de l’administration communale
- Secrétaire général, dans une moindre mesure
Les profils du métier
Proposition n°8
L’AMF propose l’identification de 3 profils :
- Secrétaire de mairie « administratif » : C+, pour les communes de petites strates
- Secrétaire de mairie « cadre » : C+/B, pour les communes de plus grandes strates
- Secrétaire de mairie « expert » : B+/A, pour les communes de plus grandes strates
Différents modèles d’organisation ressortent des échanges, en fonction de la strate de la commune, de la relation définie entre le maire et son secrétaire de mairie et enfin du niveau de qualification et de connaissances de ce dernier.
Proposition n°9
L’AMF préconise que l’employeur territorial établisse les fiches de postes correspondantes aux tâches et missions réelles exercées par les secrétaires de mairie, afin de déterminer concrètement la catégorie dans laquelle il/elle se situe. Ce qui déterminera plus facilement sa situation administrative, ses conditions de rémunération, son parcours professionnel….
La qualification et la formation initiale
Il est apparu, outre une méconnaissance de ce métier, qu’il n’existait pas de cursus scolaire dédié hormis des expériences territorialisées et diverses. Des partenariats ont été également développés localement mais ne semblent pas suffisants, ni pérennes (exemple : Pôle emploi).
Proposition n°10
L’AMF souhaite que se mette en place au niveau national une formation initiale à l’accès au métier de secrétaire de mairie qui soit qualifiante avec un cursus scolaire type bac professionnel ou licence professionnelle, en parcours direct, en formation continue ou par validation des acquis de l’expérience.
Proposition n°11
L’AMF rappelle l’importance d’un travail commun avec des organismes en charge de l’emploi, pour des passerelles privé-public, avec le renforcement concret et à long terme de l’engagement de Pôle emploi, … L’AMF préconise la mise en place d’un GT interministériel en lien avec les employeurs publics pour permettre de créer, consolider et pérenniser ces partenariats.
La formation tout au long de la carrière
L’AMF rappelle l’importance d’une sensibilisation fine des maires employeurs sur leur rôle, où en insistant, entre autres, sur l’importance de la formation des secrétaires de mairie tout au long de leur carrière. Il est essentiel de s’appuyer sur les ressources du CNFPT et en partenariat avec les associations départementales de l’AMF.
Proposition n°12
L’AMF propose le déploiement de formations territorialisées, et d’envisager des formations sous forme hybride, afin de répondre aux problématiques de déplacement et/ou d’absence des secrétaires de mairie.
Proposition n°13
L’AMF propose de mettre en place une formation dite de prise de poste pour les secrétaires de mairie junior nouvellement nommés, dans les 6 premiers mois après leur nomination, afin de leur permettre d’appréhender l’environnement territorial, juridique et professionnel.
Proposition n°14
L’AMF préconise la mise en place de journées professionnelles, annuelles, à l’échelon départemental, permettant l’échange et l’actualisation règlementaire, et qui pourraient pallier les difficultés rencontrées pour assurer les veilles juridiques et les manques de réseaux et supports métier.
Proposition n°15
L’AMF suggère également des boites à outils dédiées spécifiques aux secrétaires de mairie (agenda des dates butoirs, veille juridique newsletter) qui pourraient être alimentées par l’ensemble des institutions, sur l’exemple de la e-communauté animée par le CNFPT.
Le parcours professionnel et la rémunération
L’AMF souhaite valoriser la mobilité professionnelle des secrétaires de mairie qui doit être vue comme une potentialité de progression de carrière, à l’instar des cadres territoriaux. Les règles induites comme le CET, ou la question des temps non complet doivent donc être par exemple moins bloquantes.
L’AMF prône donc une réelle perspective de parcours professionnel permettant une véritable évolution de carrière.
Proposition n°16
L’AMF propose de valoriser le temps d’exercice de fonctions de secrétaires de mairie pour permettre un accès spécifique aux catégories supérieures par voie de concours ou promotion interne mais aussi pour l’avancement de grade.
Proposition n°17
Elle invite à utiliser les bilans de compétences, à déployer la VAE, en lien avec les CDG, pour faire reconnaitre par des qualifications certifiantes l’expérience et les compétences. Ce qui pourrait éventuellement être des modules de formation proposés par le CNFPT au titre du compte personnel formation (CPF).
Proposition n°18
L’AMF serait favorable à des NBI supplémentaires, au vu des responsabilités portées par les secrétaires de mairie « cadre » et « expert ».
L’environnement de travail
Il est important de dynamiser les réseaux sur une échelle territoriale pertinente, pour des retours d’expérience entre agents, des échanges sur leur métier et favoriser ainsi la formation. Il s’agit également de privilégier la mise en place de logiciels métiers ou outils informatiques communs, pour les secrétaires de mairie multi-employeurs pour un exercice de leurs missions plus efficaces (CF. proposition n°4).
De même, il apparait indispensable de trouver des solutions aux différentes situations d’absence des agents en favorisant leurs remplacements pour faciliter leur disponibilité et permettre la continuité des services publics. Ainsi, les centres de gestion, véritables opérateurs territoriaux sur le volant RH pour les employeurs ruraux, doivent être leurs partenaires efficients pour pallier les absences temporaires ou prolongées des agents.
Proposition n°19
L’AMF préconise de travailler avec la FNCDG à mettre en place « une compétence obligatoire » pour offrir un service commun de remplacement par les CDG sur l’ensemble des territoires.
Proposition n°20
L’AMF suggère également de favoriser la mise en place de service mutualisé d’agents « volants » (brigades mobiles).
Proposition n°21
L’AMF préconise d’ajuster les documents uniques, documents règlementaires des collectivités en matière de prévention des risques psycho-sociaux (RPS), sur la vigilance du positionnement des secrétaires de mairie en agent isolé.
Proposition n°22
L’AMF propose, dans la ligne droite des évolutions en matière d’organisation du travail, et notamment le déploiement du télétravail, de permettre à ces agents, secrétaires de mairie, de pouvoir exercer une partie de leurs missions notamment administratives (gestion des payes, comptabilité, préparation des actes administratifs…) en télétravail, ce qui passe obligatoirement par un accompagnement idoine des communes pour se faire (mise en place de supports informatiques, d’expertise juridique…).
Les outils de l’AMF
L’AMF a déployé récemment de nombreux outils à l’attention de ses adhérents sur leur rôle d’employeurs : un guide sur la mise en œuvre des lignes directrices de gestion (LDG), un module de formation interactif accessible en ligne destiné aux maires et présidents d’EPCI pour les accompagner dans leur rôle d’employeur territorial (en partenariat avec le CNFPT), et un guide pour accompagner l’employeur territorial à définir sa stratégie et piloter la politique RH de sa collectivité (en partenariat avec le CNFPT et la FNCDG).
L’AMF souhaite donc poursuivre et établir des boites à outils pertinentes pour les communes employant des secrétaires de mairie.
Proposition n°23
Ainsi, l’AMF propose l’élaboration d’un vademecum des secrétaires de mairie tant sur les règles de gestion RH (gestion multi-employeur, régime indemnitaire, recrutement, …) que sur les bonnes pratiques, avec l’appui de ses opérateurs, les CDG.
Proposition n°24
De même, l’AMF propose la mise en place d’un répertoire métier, sur les spécificités liées aux formations, dans tous les champs de compétence et leur particularité, en lien étroit avec le CNFPT.
Propositions n°25
L’AMF propose enfin de saisir les ministres sur l’impérieuse nécessité de retrouver l’ingénierie territorialisée, le rôle conseil des préfectures et des directions déconcentrées de l’Etat dans les territoires de surcroît ruraux pour sécuriser l’environnement professionnel des secrétaires de mairie dans leur rôle juridique auprès des élus.
Propositions n°26
L’AMF s’engage à mettre en relation autant que possible les potentiels partenaires qui offriraient des solutions pertinentes aux difficultés recensées sur ce métier, comme elle l’a déjà fait avec Défense mobilité.
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