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Emplois aidés : les maires face au casse-tête

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Si, du côté du gouvernement, on se félicite d’une rentrée qui se serait passée « sans couacs », les choses ont été bien plus compliquées sur le terrain, où de nombreux maires se débattent avec le casse-tête provoqué par la suppression brutale de milliers d’emplois aidés. Rentrée décalée, coups de mains de bénévoles ou d’élus, les initiatives ont été nombreuses.
Dans un certain nombre de communes, les maires n’ont pas eu d’autre choix que de ne pas faire la rentrée, faute de personnel suffisant pour pouvoir respecter les règles de sécurité et d’encadrement. Dans une grande partie des communes de La Réunion la rentrée a été retardée, ainsi que dans bien d’autres en métropole. À Sartilly-Baie-Bocage, dans la Manche (lire Maire info d’hier), ou encore à Valorbiquet dans le Calvados, où les trois écoles resteront fermées cette semaine. La maire, Christelle Bacq-de-Paepe, a diffusé une vidéo sur les réseaux sociaux, où elle explique qu’en cette rentrée, la commune a perdu cinq emplois aidés, ce qui « empêche tout simplement de pouvoir accueillir les enfants en toute sécurité ».
À l’autre bout du pays, dans la Drôme et l’Ardèche, plusieurs maires ont également dû constater l’absence de personnel pour surveiller les cantines ou les garderies et reporter la rentrée : c’est le cas à Saint-Jeure-d'Ay et Saint-Jean-Chambre, en Ardèche, et à Sainte-Croix, dans la Drôme. Le comble, racontent les maires de ces communes dans la presse régionale ce matin, c’est que l’académie exerce maintenant une forme de chantage en expliquant que si ces écoles n’ouvrent pas, « c’est que ces écoles ne sont pas utiles dans ces villages » – avec les conséquences que l’on imagine. Une pression qui choque profondément les maires d’autant que la maire de Saint-Jeure-d’Ay, par exemple, Brigitte Martin, dit avoir alerté les services de l’État depuis plus d’une semaine et n’avoir reçu en retour « aucun appel ».
Dans le Gard, quatre communes ont également reporté la rentrée ; dans la commune de Dommesargues, le maire, Bernard Clément, a assuré la rentrée, mais la disparition des cinq emplois aidés implique la disparition du transport scolaire, de la garderie et de la cantine. Il lui faudrait trouver « 100 000 euros » pour faire face, ce qui paraît impossible dans une commune de 800 habitants. Résultat : le maire craint qu’à terme, les parents finissent par être contraints de retirer leurs enfants de l’école et « les mettre dans le privé à Nîmes », avec à la clé la fermeture de l’école.
Dans d’autres communes, les maires ont rivalisé d’idées originales pour sensibiliser à la question des emplois aidés – en mettant par exemple la main à la pâte eux-mêmes, comme le maire de Doignies, dans le Nord, Pascal Mompach, qui en compagnie de quatre maires de communes voisines, a servi lui-même les repas à la cantine scolaire à la place des emplois aidés qui ont disparu. Dans le Pas-de-Calais, à Calais, la maire Nathalie Bouchard a, elle, assuré elle-même la sécurité en sortie d’école avec d’autres élus de la commune. Reconnaissant qu’il s’agit surtout d’une « opération de communication », la maire de Calais, pour la suite, va faire appel au personnel communal pour suppléer, au moins pendant un mois, l’absence des emplois aidés. Selon les calculs de la presse régionale, ce seraient quelque 20 000 emplois aidés qui seraient supprimés à l’échelle des deux départements du Nord et du Pas-de-Calais.
Ailleurs encore, les maires doivent faire appel au « système D », comme le dit Jean-Pierre Picard, le maire de Reilhac (Cantal). En faisant appel par exemple, dans cette commune, à une ancienne employée polyvalente aujourd’hui en retraite, qui est venue aider en cuisine à titre bénévole, « pour ne pas laisser l’école dans la panade ». Et c’est la secrétaire de mairie qui va assurer la surveillance de la sieste en maternelle et le ménage des écoles, pendant qu’une élue, adjointe au maire, aide au service à la cantine. Une situation qui, si elle illustre le dévouement des élus et des personnels communaux, ne peut pas durer éternellement.
Cette situation ne touche évidemment pas que les communes. Les départements, qui gèrent les collèges, sont touchés de la même manière. Pierre Camani par exemple, président du département du Lot-et-Garonne, dénonce ce matin la suppression de 36 contrats aidés à l’échelle du département – ce qui représenterait « une dépense de 750 000 euros » si le département devait les prendre en charge. Pierre Camani souligne que pour les départements, c’est la double peine, avec d’une part les difficultés à gérer dans les collèges, mais aussi, à termes, l’inévitable glissement des anciens emplois aidés vers le RSA… financé par le département.
Au niveau régional, enfin, le problème ne se pose pas moins. Hier, le conseil régional de Bretagne, par la voix de son président Loïck Chesnais-Girard, a vivement critiqué la suppression des emplois aidés. Dans une lettre ouverte au Premier ministre, le président de la région pointe le risque de voir des associations « fragilisées », voire contraintes de mettre un terme à certaines de leurs activités. Loïck Chesnais-Girard réclame « un moratoire du gel des emplois aidés », soulignant que la décision a été prise « sans concertation ni délai ».
On en saura peut-être un peu plus aujourd’hui sur les intentions du gouvernement, avec le discours prévu du président de la République, en milieu de journée, devant le corps préfectoral. Le député Richard Ferrand, proche du président, a déclaré ce matin qu’Emmanuel Macron aborderait la question des emplois aidés.

F.L.
 
 
Référence : BW24789
Date : 5 Sep 2017
Auteur : Franck Lemarc


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