Entretien avec Stéphanie Guiraud-Chaumeil, présidente de la CA de l'Albigeois : « L’intercommunalité, un échelon incontournable pour porter la relance »
Maire d'Albi (Tarn) et présidente de la communauté d'agglomération de l'Albigeois, Stéphanie Guiraud-Chaumeil copréside également la commission Intercommunalité de l’AMF. Elle défend une place forte pour l’intercommunalité notamment dans le cadre du plan de relance, mais à condition de ne pas l’opposer aux communes. Adepte de la différenciation, elle propose que les CRTE (contrats de relance et de transition écologique), pour lesquels l’échelle intercommunale lui apparaît le plus souvent très pertinente, puissent avoir des dérogations de périmètre dans certains cas, en particulier pour les intercos XXL. Très satisfaite du programme Action cœur de ville, et de ses premiers résultats tangibles sur son territoire, elle insiste pour qu’il ne soit pas mis à mal par son intégration dans les CRTE. Entretien.
Quel regard portez-vous sur l’intercommunalité aujourd’hui ?
En quelques années, le fait intercommunal est devenu prépondérant, pour la gestion du quotidien comme pour préparer l’avenir. Il apparaît donc essentiel, tout en étant indissociable de la commune. Il ne faut pas les opposer car nous avons besoin des deux. Aujourd’hui, il n’est plus possible de penser l’évolution de nos territoires sans l’intercommunalité, en matière de développement économique, d’urbanisme ou de mobilités. Je rappelle une évidence : il s’agit de faire ensemble ce qu’on ne pourrait pas faire tout seul. L’intercommunalité constitue donc une chance. Mais il ne faut pas poser de hiérarchie entre communes et EPCI car l’interco c’est nous tous !
Que pensez-vous de sa place importante dans le plan de relance ?
La porte d’entrée de l’intercommunalité apparaît plus simple mais aussi logique compte tenu de ses compétences notamment économiques. Elle constitue un échelon incontournable pour porter la relance. Mais cela peut devenir un frein en cas de relations tendues avec les communes. Ainsi, le portage des projets relance doit absolument se faire en complémentarité avec les communes et non pas en se substituant à elles. La responsabilité de l’interco est donc de toutes les associer, en particulier les petites communes rurales.
Comment cela se passe-t-il dans votre agglomération ?
Nous avons centralisé tous les projets relance en apportant l’ingénierie nécessaire. L’agglo met à disposition un guichet unique avec une personne dédiée pour aider les communes à monter leurs projets : cela permet d’avoir les mêmes process et de déposer des dossiers dans les clous. Cette aide est importante, notamment pour les nouveaux élus pas encore au fait de toutes les procédures, d’autant plus dans cette période chamboulée par la crise sanitaire où les rencontres restent très difficiles.
Par ailleurs, le levier du plan de relance me semble très positif en constituant un accélérateur. Mais ce n’est pas un effet d’aubaine car nous partons avant tout de projets et non pas des financements qui viennent dans un second temps. Ils nous permettent de faire davantage et plus vite. Les chantiers, même les plus petits, sont vitaux pour les entreprises locales en ce moment.
L’échelle intercommunale pour les CRTE vous semble-t-elle justifiée ?
Cela me semble logique mais il faut que les maires puissent y être associés sinon il y a aura un vrai problème d’appropriation. Le CRTE est positif en constituant un outil financier et de simplification qui doit aussi permettre la différenciation. De plus, ce type de contrat donne l’occasion de refaire le point sur nos projets comme sur le projet de territoire. Mais il demeure beaucoup d’interrogations notamment sur son articulation avec le CPER (contrat de plan Etat-région), son évolutivité, sa durée, le maintien ou non de dispositifs dédiés comme Action cœur de ville, un calendrier trop rapide avec une signature prévue dès juin…
Quelle place pour les maires dans le CRTE ?
Il ne faut pas minimiser cette place. Nous réfléchissons à plusieurs options possibles. Par exemple, un avenant au CRTE pourrait être signé par tous les maires. C’est important de reconnaître leur rôle, je rappelle que l’interco n’est pas une commune nouvelle ! Une approche de différenciation permettrait aussi de ne pas traiter toutes les situations de la même façon. Je pense notamment aux intercos XXL ayant particulièrement besoin de rassembler et de laisser de la place aux communes. Cela pose donc la question du périmètre du CRTE. Si la plupart du temps, l’échelle intercommunale est totalement pertinente, il faudrait néanmoins de la souplesse dans certains cas, en autorisant par exemple une contractualisation à l’échelle des bassins de vie dans les très vastes territoires.
Comment jugez-vous le programme « Action cœur de ville » ?
Il s’agit d’un très bon outil pour des territoires moyens comme les nôtres. C’est la première fois que nous disposons d’un programme aussi transversal, ce qui est très positif. Sur Albi et son agglomération, nous montons en vitesse de croisière et disposons déjà de premiers résultats concrets, notamment grâce à la mise en place d’une ORT (opération de revitalisation de territoire). La ville et la CA sont signataires du contrat, ce qui montre bien l’interdépendance entre les deux échelons !
Propos recueillis par Philippe Pottiée-Sperry
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