C’est l’article 172 de la Lom qui prévoit que « les lignes d'intérêt local ou régional à faible trafic du réseau ferré national peuvent, sous réserve de l'accord préalable du ministre chargé des transports et après avis de SNCF Réseau, faire l'objet d'un transfert de gestion (…) au profit d'une autorité organisatrice de transport ferroviaire, à la demande de son assemblée délibérante ». Un an après la loi, il va maintenant être possible de passer à l’acte avec la parution de ce décret du 29 décembre 2020.
Le texte définit d’abord le champ d’application de la réforme, c’est-à-dire qu’il définit les « lignes d’intérêt local » ou « à faible trafic ». Trois critères sont retenus : il peut s’agir de lignes « comprises dans la liste des infrastructures ferroviaires locales », de lignes « n’appartenant pas au réseau local structurant (…) et sur lesquelles au moins 90% des services réguliers de transport ferroviaire de voyageurs au cours des cinq derniers horaires de service réalisés étaient organisés par des autorités organisatrices de transport ferroviaire autres que l’État » ; ou enfin de lignes « lesquelles aucun service de transport ferroviaire de voyageurs n’a circulé au cours des cinq derniers horaires de service réalisés ».
La décision pour une région de reprendre une de ces lignes doit être exprimée par l’assemblée délibérante. Dès lors, la région doit adresser au ministre chargé des transports un dossier contenant l’identification des lignes, le périmètre du transfert (en particulier les installations de service) et l’intention de recourir, ou pas, « à la mise à disposition » de salariés de la SNCF. Si des gares sont exclusivement affectées à la ligne choisie, la région peut demander le transfert de la gestion de cette gare.
Si le dossier est validé, une « convention technique d’application » sera signée entre la région, les filiales concernées de la SNCF et éventuellement un gestionnaire délégataire de service public (société de transport).
De même, un dossier de demande de transfert de mission devra être constitué, et une convention spéciale signée sur le sujet (périmètre des missions transférées, questions de gestion et de maintenance, droit d’accès aux emprises…)
Les conventions devront fixer les compensations financières qui seront versées à la SNCF, qui seront effectuées annuellement sur une durée de vingt ans. Elles sont déterminées « en fonction des coûts et des recettes liés aux actifs transférés ».
Le décret précise aussi en détail les conditions de transfert des salariés de la SNCF, qui seront « prêtés » à la collectivité qui gèrera la ligne ou à l’entreprise délégataire. Les salariés concernés doivent donner leur accord à leur « prêt ». Point important : les salariés ainsi prêtés resteront, durant toute leur mise à disposition, soumis aux règles « légales, statutaires et conventionnelles » dont ils bénéficiaient dans l’entreprise dans laquelle ils exerçaient. Autrement dit, les cheminots qui seront « prêtés » conserveront leur statut, ainsi que les régimes d’assurance sociale et de protection sociale complémentaire dont ils bénéficiaient à la SNCF.
Lors de l’examen de ce texte par le Conseil national d’évaluation des normes (Cnen), le 8 octobre dernier, les représentants des élus se sont dit « unanimement favorables aux objectifs poursuivis par cette réforme », et ont salué la « concertation » et la « co-construction » de ce décret entre l’État et les régions.
En revanche, les élus représentant le bloc local ont regretté n’avoir pas été suffisamment associés à la rédaction du texte, rappelant que la Lom a donné aux intercommunalités de nouvelles compétences en matière de mobilité. Ils ont demandé que les régions, dans la mise en œuvre de la réforme, « mènent un travail de concertation au niveau des bassins de mobilité », notamment sur la question des gares, « nœuds d’intermodalité essentiels sur les territoires ».
Les élus représentant le bloc communal ont rappelé « l’importance des lignes ferroviaires d’intérêt local », indispensables notamment en termes de déplacements domicile-travail. Ils assurent donc qu’ils veilleront à ce que « les décisions de transfert opérées soient fondées sur des objectifs de service public et soient respectueuses d’un aménagement du territoire équilibré entre zones denses et moins denses, et ne prennent pas en compte seulement des considérations économiques ».
Franck Lemarc
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