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Polices municipales, le juste équilibre des prérogatives à trouver

A la veille de la relance du Beauvau des polices municipales, le forum « polices municipales, le juste équilibre des prérogatives à trouver » a eu lieu le mercredi 20 novembre dernier au 106ème Congrès des maires. Co-présidé par Jean-Paul Jeandon, maire de Cergy et Frédéric Masquelier, maire de Saint-Raphaël, le forum, fort bien animé par Henri Weill, a dépassé de plus d’une demi-heure le temps imparti, tant les débats ont passionné l’auditoire.

Le rôle des maires en matière de sécurité est devenu incontournable. La montée en puissance des polices municipales depuis une vingtaine d’années en est l’illustration principale. Les effectifs des polices municipales sont passés de 19 400 en 2012 à plus de 27 000 en 2024 alors que parallèlement, les gardes champêtres passaient de 1240 à un peu plus de 600 effectifs. Face au recul de l’Etat en matière de sécurité et au contexte sécuritaire plus tendu, les missions des polices municipales doivent évoluer mais jusqu’où ? Telle est la question qui s’est posée au cours de ce forum.  Le 5 avril 2024, le Beauvau des polices municipales fut lancé dans un contexte post-émeutes de juillet 2023. Ce cycle de concertation avait pour objectif de redéfinir le cadre d’emploi des 4500 polices municipales composées de 27 000 agents et fut suspendu par les élections législatives anticipées. Il reste désormais un travail inachevé qu’il convient de finaliser.

Le débat s’est articulé autour de deux thématiques. La première évoquait le sujet d’une évolution « à la carte » des prérogatives des polices municipales. La seconde traitait des questions de coordination de sécurité entre l’Etat et les collectivités.

Pour introduire le forum, les deux co-présidents ont réaffirmé les principes guidant l’AMF dans ce dossier. Le principe de libre administration des collectivités territoriales laisse la main libre aux maires de se doter d’une police municipale, de l’armer et de fixer la doctrine d’emploi. Aussi la police municipale doit demeurer une police de proximité par la présence sur la voie publique et le contact avec la population. Enfin La police municipale n’est pas une force de substitution ou une variable d’ajustement mais un appui significatif à la mission d’ordre et de sécurité publics dévolue à l’État.

Au cours de la première table-ronde, plusieurs maires se sont exprimés sur les prérogatives des polices municipales : Hélène GEOFFROY, maire de Vaulx-en-Velin (69), Brice RAVIER, maire d’Amboise (37), Maider AROSTEGUY, maire de Biarritz (64). Ils ont exprimé leur difficulté dans la sécurité du quotidien et certains freins ou irritants rencontrés par leur service. Selon eux, certaines prérogatives méritent des évolutions pour gagner en fluidité comme l’accès aux fichiers judiciaires ou encore le relevé d’identité pour les délits flagrants. L’accès aux délits simples forfaitisés (comme l’usage de stupéfiants) a été évoqué et a emporté un débat sur la subordination des polices municipales à l’autorité judiciaire. Ce dernier a posé la question de la double autorité sur les polices municipales pouvant se dégager d’une telle architecture. Dans cette hypothèse, Joseph Ségura, maire de Saint-Laurent-du-Var et Secrétaire général adjoint de l’AMF, a bien rappelé que les maires ne souhaitaient pas être des « shérifs ». Eric Pauget, député des Alpes-Maritimes, a pu présenter la proposition de loi élargissant les compétences judiciaires des polices municipales. Il s’agit de créer un statut d’officier de police judiciaire « expérimental » pour les directeurs ou chef de service. Cet OPJ serait subordonné à l’autorité judiciaire pour la constatation et la verbalisation d’une dizaine de délits forfaitisés. Enfin le procureur de la république d’Amiens, Jean-Philippe Vicentini, a soutenu que des améliorations du dispositif actuel était possible. En prenant l’exemple d’une infraction routière constatée par un service et transmise au Parquet, il a démontré que les délais de réponse pénale pouvaient être améliorés grâce à des évolutions simples des prérogatives des polices municipales. Déjà, un travail sous convention, collectivité - justice - forces de sécurité intérieure, pourrait être mis en œuvre afin d’améliorer l’existant au sein d’un pôle de la tranquillité publique.

Dans la deuxième table-ronde, différents maires ont évoqué la coordination de sécurité avec l’Etat, en présence des représentants de la gendarmerie et de la police nationale. Rafika Rezgui, maire de Chilly-Mazarin (91), a évoqué le risque de l’aggravation d’un transfert de sécurité et a plaidé pour un engagement de l’Etat plus soutenu dans les conventions de coordination. Lucien JUGE, maire de Scorbé-Clairvaux (87), commune non dotée de police municipale, a montré que la coordination avec l’Etat pouvait se réinventer avec le dispositif de participation citoyenne et l’arrivée récente d’une brigade territoriale mobile de gendarmerie consacrée à la présence de voie publique. Jean-Claude Labrador, maire de Roura (973), a rebondi sur le débat en affirmant que l’évolution des conditions d’emploi des polices municipales est la clé de voute d’une meilleure coordination avec les forces étatiques. La gendarmerie et la police nationale ont répondu aux interrogations des maires en réaffirmant un principe simple, celui de la présence sur le terrain et de la confiance dans la collaboration avec les élus.

Le ministre délégué à la sécurité du quotidien a cherché à rassurer les maires. Il a rappelé au respect de la libre administration des collectivités et de la finalité de police de proximité comme mission prioritaire. S’appuyant sur la proposition de loi du député Eric Pauget, il compte proposer aux maires une boîte à outils des prérogatives des polices municipales. Libre au maire de s’en saisir par la suite.

Pour finir, plusieurs élus ont pris la parole et ont interrogé le ministre délégué à la sécurité du quotidien. Les nombreuses questions des participants ont montré l’intérêt de ce sujet porté au 106ème Congrès des maires. Il a introduit le Beauvau des polices municipales par un débat riche et engagé des maires.

Référence : BW42425
Date : 4 Déc 2024


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