Présentée par le premier vice-président délégué de l’AMF, André Laignel, cette résolution au ton combatif commence par rappeler le rôle essentiel joué par les maires – souvent « premier recours et dernier espoir de nos concitoyens » – depuis le début de la crise épidémique. Alors que la crise a « révélé de manière cruelle les dysfonctionnements de l’État dans le domaine de l’organisation du système de santé, son absence de concertation et de réactivité, son excès de bureaucratisme », les maires ont démontré, souligne la résolution, leur « capacité de faire et de faire vite et bien ». « Nos propositions ont nourri le premier plan de confinement et nous avons activement contribué au premier protocole de déconfinement, attestant si besoin est, des capacités de notre réseau. » Aide alimentaire, achat et distribution de masques, accueil des enfants des personnels des services de santé, gestion du funéraire, contact avec les personnes fragiles ou isolées… La résolution liste les nombreux sujets sur lesquels l’action des communes s’est révélée irremplaçable – et l’AMF profite de l’occasion pour rendre hommage à « l’implication, aux côtés des élus, des personnels municipaux, dont l’engagement, la compétence et la disponibilité sont trop peu considérés ».
Cette crise, tout comme la crise économique et sociale qui s’approfondit, « confirme les atouts puissants du réseau de 35 000 communes ».
Mais l’AMF dénonce aussi « la profonde dégradation des rapports entre l’État et les collectivités », dégradation que les crises mettent particulièrement « en évidence ». Les demandes formulées par l’association depuis plusieurs années n’ont jamais été satisfaites par l’État, que ce soit sur le terrain financier que sur la demande d’une nouvelle phase de décentralisation.
Si la loi Engagement et proximité a amené quelques « améliorations », « fondamentalement les difficultés demeurent ».
C’est avant tout « une profonde remise en cause de la décentralisation » que dénonce l’AMF, symbolisée par « la fin programmée de l’autonomie financière et fiscale » des communes : disparition programmée des impôts économiques locaux après celle de la taxe d’habitation, « nationalisation des taxes locales sur l’électricité » : les communes et intercommunalités sont « toujours plus dépendantes des dotations de l’État », ce qui correspond, déplore l’association, à « une lente mais certaine mise sous tutelle des collectivités ». L’AMF dénonce également l’actuelle tendance du gouvernement à mettre en avant une « hypothétique carence » des maires qui conduirait les préfets à devoir prendre la main.
On assiste donc, poursuit la résolution, à un véritable paradoxe : d’une part, l’action des maires démontre son efficacité et est plébiscitée par les Français ; et en même temps, se développe « un mécanisme accéléré de recentralisation ». « Moins l’État est présent sur le territoire, plus il renforce son autoritarisme vis-à-vis des collectivités ».
L’AMF réitère donc certaines exigences de longue date, et en ajoute d’autres, nées de la crise : en particulier, la compensation intégrale des pertes de recettes, afin que les collectivités puissent « prendre toute (leur) place dans la nécessaire relance économique » du pays.
Sur la question financière, l’association estime que le principe constitutionnel d’autonomie financière des collectivités territoriales n’est plus aujourd’hui qu’un « principe bafoué », « une fiction ». Elle annonce qu’elle envisage d’interpeller le Conseil constitutionnel à ce sujet.
Mais la question de la décentralisation n’est pas que financière. La nouvelle étape de décentralisation que l’AMF appelle – depuis des années – de ses vœux est bien plus ambitieuse que ce qui devrait figurer, pour ce qu’on en sait, dans la future et très hypothétique loi 3D. Si l’association défend l’idée d’un « État fort » tant au niveau central que local, elle demande une fois encore l’ouverture du chantier de « nouveaux transferts de compétences » : en particulier en matière de santé, car « la lutte contre les déserts médicaux dans certaines campagnes ou villes ne peut se faire sans une politique forte et territoriale de facilitation d’installation des médecins et soignants ». L’association appelle également à la réflexion sur « un nouveau partage des compétences en matière de sport et de culture », politiques publiques déjà « quasi intégralement portées par les collectivités et en particulier par les communes ».
Enfin, l’AMF demande que soit accordé aux collectivités « un réel pouvoir réglementaire », qui permettrait « au législateur et à l’exécutif de perdre moins de temps et d’énergie à réglementer chaque détail de la vie locale, les collectivités se chargeant d’adapter le plus efficacement la règle aux réalités locales. »
L’association se dit prête à tout faire pour « réussir cette nouvelle étape urgente de décentralisation pour autant qu’elle ne rime ni avec discrimination, ni avec différenciation par les inégalités de richesse des territoires. »
Franck Lemarc
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