Le 11 juillet, la suspension des travaux parlementaires en séance publique a de fait reporté l’adoption définitive de nombreux textes, dont la très attendue loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement, et ce, malgré le compromis trouvé entre députés et sénateurs le 3 juillet.
Passé de 4 à 38 articles, le texte porté par le député d’Eure-et-Loir Harold Huwart (Liot), soutenu par le gouvernement, a pris de l’ampleur au fil de la navette parlementaire. Dans la version adoptée le 15 mai à l’Assemblée, vingt articles étaient ajoutés au texte initial. Les sénateurs en ont supprimé dix et ajouté vingt-quatre dans le texte adopté le 17 juin.
Au final, le texte sorti de la CMP modifie plus de 50 articles du Code de l’urbanisme.
Pour revoir en profondeur les procédures d’évolution des documents d’urbanisme, la ministre chargée du logement Valérie Létard souhaitait passer par ordonnance, ce que le Sénat a refusé. Résultat, ce pan crucial de la réforme s’est écrit dans l’urgence, alors même qu’il procède à une petite révolution. Si le texte final est adopté dans les mêmes termes que celui de la CMP, il ne restera plus que deux (au lieu de quatre) modalités d’évolution des documents d’urbanisme : la modification simplifiée, qui devient la norme, et la révision, réservée aux seules évolutions structurantes, impactant les documents d'orientation. Objectif affiché : accélérer et sécuriser ces procédures au coût considérable pour les collectivités.
Par ailleurs, la « petite loi » du 9 juillet confirme la suppression de l’évaluation environnementale pour certaines procédures de modification des PLU (rectification d’une erreur matérielle ; réduction de la surface d’une zone urbaine ou à urbaniser). Il facilite également le recours à la participation du public par voie électronique à la place de l’enquête publique pour l’évolution des documents d’urbanisme, un dossier papier devant néanmoins être mis à disposition en mairie.
Sur la question très sensible de la solarisation et de la végétalisation des parkings et bâtiments, dont l’allégement avait provoqué une levée de boucliers, la CMP a raisonnablement rétabli les obligations initiales. Sur les parkings, le texte est revenu à l’article 40 de la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables – dite loi Aper – qui fixe un seuil minimal de 35 % de panneaux solaires sur la moitié de la surface totale du parking. Plus précisément, « l’obligation (…) est considérée comme satisfaite lorsque les parcs de stationnement extérieurs sont équipés de procédés mixtes concourant, au total, à l’ombrage d’au moins la moitié de leur superficie. Ces procédés mixtes correspondent à une part d’ombrières mentionnées au même premier alinéa couvrant au moins 35 % de la moitié de la superficie de ces parcs et à des dispositifs végétalisés concourant à l’ombrage de la surface restant à couvrir. ». Le texte accorde néanmoins des délais supplémentaires aux propriétaires de parkings pour se mettre en conformité avec la loi.
Autre mesure « choc » modérée en CMP, l’adaptation du régime des résidences hôtelières à vocation sociale (RHVS) pour y loger provisoirement des salariés de chantiers avoisinants, en réduisant l’accueil des publics vulnérables. Le texte final crée en ce sens des « résidences à vocation d’emploi » pour compléter cette disposition d’urgence destinée à répondre aux besoins des grands chantiers liés au nucléaire et à la réindustrialisation.
Le document d’urbanisme unique (valant Scot et PLUi) et l’opération de transformation urbaine – deux outils créés de toute pièce par la loi – figurent toujours dans le texte de la CMP. Le permis d’aménager multisites, portant sur des unités foncières non contiguës, est également conservé pour les opérations de renaturation et les lotissements.
Conformément au projet de loi initial et aux vœux du Sénat, le texte sorti de la CMP réduit de trente à quinze ans le délai à partir duquel les communes peuvent acquérir des biens sans maître, tout en facilitant la transmission d'informations aux maires par l'administration fiscale sur ces bâtiments vacants. De même, le renforcement de la couverture du territoire par les établissements publics fonciers est confirmé pour faciliter l’accès des communes à ces outils d’ingénierie.
D’autres avancées pragmatiques sont à relever en matière de contentieux de l’urbanisme. Ainsi, comme prévu par le texte initial, le délai de recours gracieux ou hiérarchique est réduit à un mois (au lieu de deux). Et « le silence gardé pendant plus de deux mois sur ce recours par l’autorité compétente vaut décision de rejet. ». Le texte cristallise par ailleurs les règles d’urbanisme à la date du permis initial pour la délivrance de permis modificatifs « pendant une période de trois ans à compter de la date de délivrance du permis initial ».
Pour lutter contre les recours abusifs, le texte encadre les demandes de substitution de motifs : « Lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation à l’encontre d’une décision (…) refusant l’occupation ou l’utilisation du sol ou d’une demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant cette décision, l’auteur de cette dernière ne peut plus invoquer de motifs de refus nouveaux après l’expiration d’un délai de deux mois à compter de l’enregistrement du recours ou de la demande. »
Par ailleurs, la présomption d'urgence en cas de référé-suspension à l'encontre d'un refus d’autorisation d’urbanisme est conservée dans le texte de la CMP, tout comme la condition de recevabilité aux recours contre les documents d’urbanisme d’avoir « pris part à la participation du public ».
À noter que la loi durcit les sanctions en cas de travaux irréguliers : la mise en demeure pour travaux non conformes pourra ainsi être assortie d’une amende pouvant aller jusqu’à 30 000 euros, tandis que le montant maximal de l'astreinte passe de 25 000 à 100 000 euros.
Pour Valérie Létard, « ce texte n'est qu'un début : beaucoup reste à faire, notamment pour alléger le millefeuille de la planification ». Des travaux complémentaires seront lancés dans les prochains mois, a-t-elle ainsi annoncé ce 9 juillet devant les sénateurs, « pour revoir nos codes et nos procédures, sans oublier la transposition de nombreux textes européens et le prochain projet de loi de finances : nos modèles économiques et fiscaux devront sans doute être ajustés ».
Caroline Reinhart pour Maire-info, article paru le 24 juillet 2025.
La reproduction partielle ou totale, par toute personne physique ou morale et sur tout support, des documents et informations mis en ligne sur ce site sans autorisation préalable de l'AMF et mention de leur origine, leur date et leur(s) auteur(s) est strictement interdite et sera susceptible de faire l'objet de poursuites.