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Vers une révision de la loi NOTRe ?

En reconnaissant « une intercommunalité forcée », Emmanuel Macron s’est dit « prêt à rouvrir la loi NOTRe », le 15 janvier, au Grand-Bourgtheroulde (Eure). Il s’agissait du premier déplacement du président de la République, devant quelque 700 maires de Normandie, dans le cadre du grand débat national. Evoquée depuis quelque temps, la reconnaissance par l’exécutif du besoin de révision de la loi apparaît à présent clairement affirmée même si elle n’est pas détaillée. Les mesures nécessaires, réclamées par de nombreux élus, sont déjà bien connues : améliorer la gouvernance des intercommunalités, arrêter les transferts obligatoires au premier rang desquels les compétences « eau » et « assainissement », rétablir l’intérêt communautaire…

 

Un maire sur deux ne compte pas se représenter aux municipales de 2020, selon une enquête du Cevipof réalisée avec l’AMF, à l’occasion du dernier congrès des maires et des présidents d'intercommunalité. Parmi les explications : la loi NOTRe perçue négativement par pas moins de 75% d’entre eux ! Ce rejet de la loi du 7 août 2015 et en particulier de son volet relatif à l’intercommunalité, perçu par les maires comme « un affaiblissement des communes », demeure toujours aussi puissant. La preuve, lors des premières rencontres du président de la République avec les maires, dans le cadre du grand débat national, les récriminations sur ce sujet sont revenues très souvent dans leurs témoignages. En ligne de mire des élus : la remise en cause de la proximité. « Je suis prêt à rouvrir la loi NOTRe », a annoncé Emmanuel Macron, sous les applaudissements des maires, le 15 janvier, au Grand-Bourgtheroulde (Eure). Et de reconnaître qu’il faut « remettre de la responsabilité au plus près du terrain, du contact, de la clarté et du sens dans nos décisions ». 

 

« L’intercommunalité forcée »

« On a une série de décisions qui ont conduit, pour nos concitoyens – l’intercommunalité forcée, les réorganisations pendant des années et la régionalisation accélérée – à donner le sentiment qu'on s'éloignait », a reconnu également le chef de l'État, en évoquant le « besoin d'une respiration sur des choses qui ont été mal faites. » Il a demandé à Jacqueline Gourault, la ministre de la Cohésion des territoires, et à son ministre délégué, Sébastien Lecornu », de porter un « projet qui permette d’améliorer ce qui dans cette loi ne fonctionne pas ».

Rappelons également les propos d’Emmanuel Macron dans sa lettre du 16 novembre dernier envoyée aux maires reconnaissant « l'application mécanique et parfois trop stricte de la loi NOTRe [qui] ont pu être sources de dysfonctionnements et de déceptions ». Déjà il se disait prêt à « modifier la loi ». Mais pour l’instant rien de très précis.

 

« Modifier ce qui ne va pas »

La ministre de la Cohésion des territoires, a confirmé le 22 janvier, lors des vœux de l’AdCF, l’annonce du président de la République de revenir sur la loi NOTRe « pour modifier ce qui ne va pas », tout en précisant qu’ « il ne n’agit pas de tout reprendre ». Selon Jacqueline Gourault, « les besoins concernent notamment l’amélioration de la gouvernance de l’intercommunalité ou le besoin de créer une identité intercommunale ». Elle n’est pas rentrée plus dans le détail. Les mesures à prendre sont pourtant déjà bien connues.

 

Améliorer la gouvernance

Résultant de la loi NOTRe, l’élargissement des périmètres intercommunaux à marche forcée a éloigné les élus des instances de décision. Les élus, notamment via l’AMF, demandent donc d’être mieux représentés, notamment en renforçant la place des maires dans les intercommunalités. Cela pourrait passer par une meilleure reconnaissance du conseil des maires (création obligatoire lorsqu'ils ne sont pas tous déjà présents au sein du bureau) ou la mise en place d’outils de concertation et de codécision entre les communes et l’intercommunalité. Le rapport du sénateur Mathieu Darnaud, remis en novembre dernier, proposait ainsi d’instaurer, dans chaque EPCI à fiscalité propre, une instance de dialogue avec les maires (bureau élargi, conférence des maires, etc.). L’amélioration de la gouvernance devrait aussi passer par les conseillers municipaux qui seraient mieux informés, associés et formés.

 

Arrêter les transferts obligatoires

La première demande est d’arrêter tout transfert obligatoire de compétences aux intercommunalités. Il s’agirait aussi de revenir à plus de souplesse dans l’organisation des compétences et de leurs modalités d’application. Le rapport Darnaud propose de cesser d'imposer par la loi des transferts de compétences « en bloc ».

 

Compétences « eau » et « assainissement »

Parmi les transferts aux intercommunalités les plus décriés figure celui des compétences « eau » et « assainissement ». La loi du 3 août 2018 est revenue sur sa mise en œuvre mais en maintenant son caractère obligatoire. Il est juste reporté : au plus tard le 1er janvier 2020 pour les communes d’une communauté d’agglomération, et au plus tard le 1er janvier 2026 pour celles d’une communauté de communes. L’obligation demeure donc. L’idée serait de rendre ce transfert facultatif en redonnant une liberté de décision aux élus.

 

Rétablir l’intérêt communautaire

Diluée au fil du temps, la notion d’intérêt communautaire ne joue plus son rôle voire même parfois disparait. Il pourrait être proposé de rétablir systématiquement l’intérêt communautaire et lui donner toute sa place dans les transferts de compétences car c’est vraiment lui qui traduit le projet de territoire.

 

Déconcentrer l’intercommunalité

Constatant de « nombreuses communautés encombrées de compétences de proximité qu'elles n'ont pas les moyens d'exercer convenablement », le rapport Darnaud plaide pour la possibilité de les « déconcentrer » à « un échelon plus proche du terrain ». En pratique, les conseils communautaires pourraient déléguer une partie de leurs compétences à des pôles territoriaux, constitués d’une ou plusieurs communes.

Référence : BW39240
Date : 1 Fév 2019
Auteur : Philippe Pottiée-Sperry


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