Espace Associations départementales


Réindustrialisation : les intercommunalités freinées par le ZAN

Les élus sont convaincus de la nécessité de réindustrialiser les territoires mais pointent de nombreuses contraintes au premier rang desquelles le ZAN. Principal problème soulevé durant le forum : le manque de foncier disponible et le renchérissement de son coût. Parmi les leçons de la crise sanitaire ou de la crise énergétique, la souveraineté industrielle est redevenue une priorité nationale. S’appuyant sur une réindustrialisation des territoires dans le cadre de la transition écologique (sobriété foncière, décarbonation…), elle donne un rôle important aux intercommunalités. Lors du forum consacré à ce sujet, le 22 novembre, Alain Chrétien, maire Vesoul (70), président de la communauté d’agglomération et vice-président de l’AMF, a donné d’abord une bonne note à la nouvelle loi « Industrie verte » du 23 octobre 2023, visant à faciliter la réimplantation industrielle dans le pays. Et d’appeler « tous les élus à s’emparer des nouveaux dispositifs ». Il souligne que pour l’accueil des entreprises, les élus interviennent sur tous les fronts : logement, routes, crèches, écoles… Avec aussi un enjeu important en termes d’emplois. « Je sens beaucoup d’inquiétudes sur la réindustrialisation alors qu’elle devrait susciter des espoirs », estime Alain Chrétien, tenant à faire passer un message positif.

 

 

« Injonctions contradictoires de l’Etat »

Tout en saluant la loi « Industrie verte », André Laignel, maire d’Issoudun (36), président de la communauté de communes du Pays d'Issoudun et premier vice-président délégué de l’AMF, dénonce « les nombreuses injonctions contradictoires de l’Etat » au premier rang desquelles la conciliation entre les contraintes du ZAN (zéro artificialisation nette) et la nécessité de développer l’industrie. Une critique partagée par tous les intervenants. « Je n’ai pas été élue pour dire non à des entreprises qui veulent s’implanter ou s’étendre, s’emporte Isabelle Le Callennec, maire de Vitré (35) et présidente de Vitré Communauté, territoire dynamique accueillant 40% d’emplois industriels avec un taux de chômage de 3,5%. Parmi les freins, elle cite aussi l’opposition forte d’associations environnementales qui ralentit les projets voire amène les entreprises à aller ailleurs.  

Logement ou développement économique ?

La maire de Vitré « refuse de devoir arbitrer entre le développement économique et l’habitat ». A cette question, Guillaume Guerin, président de Limoges Métropole (87) et vice-président de l’AMF, répond sans hésiter qu’il choisira l’accueil d’entreprises « car j’en ai besoin pour recréer de la richesse dans mon territoire ». « Mais encore faut-il avoir du foncier disponible », reconnaît-il. Et de citer le cas d’une entreprise de literie qui souhaite s’étendre (90 emplois supplémentaires) sur une parcelle de 14 hectares qu’il n’a pas. « Demain, avec la mise en application du ZAN, cela sera encore pire », s’alarme-t-il en demandant à « l’Etat d’entendre les remontées des élus ». Pour sa part, Bruno Bernard, président de la métropole de Lyon, estime qu’« on ne peut plus accepter des projets industriels sur de grandes superficies qui génèrent peu d’emplois ». Il défend un « soutien sélectif à l’industrie » et propose plusieurs dispositifs d’aide sur la décarbonation. « Tous les élus sont d’accord pour tendre vers la sobriété foncière mais attention de ne pas mettre en péril l’aménagement du territoire », prévient Guillaume Guerin. La maire de Vitré plaide ainsi pour « une évolution de la loi ZAN pour des raisons de bon sens ».

Besoin de 22 000 hectares

Présent lors du forum, Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie, défend les simplifications prévues par la loi « Industrie verte ». Il tient aussi à relativiser le manque de foncier industriel, en indiquant qu’il faut seulement 22 000 hectares : « cela se trouve ». « Pour réussir la dépollution et financer les services », il met en avant « le plan d’un milliard d’euros de la Banque des territoires pour développer du foncier industriel et financer le dispositif 50 sites clés en main, de toutes tailles et sur tous les territoires ».

Pour trouver les 22 000 hectares nécessaires, Olivier Sichel, directeur de la Banque des territoires, précise « les trois sources que sont la verticalisation (8000 hectares), la réhabilitation des friches (8000 hectares) et 6000 hectares à trouver sur cinq ans, ce qui est faisable ». Isabelle Le Callenec demande « en premier lieu de sortir ces 22 000 hectares du calcul du ZAN ».

Critique de la suppression de la CVAE

D’une même voix, les élus fustigent la suppression de la CVAE et la perte du lien entre l’entreprise et le territoire d’accueil. « La compensation à l’euro près n’est pas au rendez-vous et nous avons été spoliés de 765 millions d’euros », s’insurge André Laignel. Dans la salle, Thierry Delbreil, maire de Lafrançaise (82), chiffre à 100 000 euros la perte pour l’EPCI qu’il préside. « La fraction de TVA constitue un outil indigeste pour nos petits budgets, dénonce-t-il. Les dispositifs décidés par le législateur ne sont pas faits pour la ruralité et nous fragilisent ».

Gouvernance région/EPCI

« En matière de développement économique, la région coconstruit tout avec les EPCI ». Sophie Gaugain, première vice-présidente de Normandie, chargée du développement économique, défend ce binôme qui donne des résultats. C’est vrai qu’elle est aussi maire de Dozulé (14) et vice-présidence de sa communauté de communes. « Pour créer un climat de confiance, il était important d’aller rencontrer chaque EPCI. Dès 2016, nous avons développé cette gouvernance main dans la main pour construire le schéma de développement économique », explique-t-elle. Au programme : le repérage des besoins territoriaux et la création de l’ingénierie nécessaire avec un guichet unique et des partenariats, notamment avec l’EPF Normandie pour aider les EPCI.

Philippe Pottiée-Sperry

 

Visionnez les vidéos sur le lien suivant : VOD du 105ème Congrès de l'AMF

 

Référence : BW41980
Date : 28 Nov 2023
Auteur : Philippe Pottiée-Sperry pour l'AMF


Partager :

La reproduction partielle ou totale, par toute personne physique ou morale et sur tout support, des documents et informations mis en ligne sur ce site sans autorisation préalable de l'AMF et mention de leur origine, leur date et leur(s) auteur(s) est strictement interdite et sera susceptible de faire l'objet de poursuites.