Une fois n’est pas coutume, le texte présenté par le gouvernement ne provoque pas un rejet franc et massif des associations d’élus, cette année, contrairement aux années précédentes où plusieurs mesures avaient provoqué la colère de celles-ci. Mais il plane encore une fois sur ce projet de loi de finances un petit parfum de recentralisation, ce que dénonce l’AMF.
Au chapitre des bonnes nouvelles, l’AMF salue l’abandon, pour le moment en tout cas, de la réforme de l’Ifer (lire Maire info du 13 septembre). Le gouvernement, rappelons-le, envisageait de changer les règles sur l’Ifer (imposition forfaitaire des entreprises de réseau) radioélectrique, jugé trop coûteux pour les entreprises. La réforme envisagée, quel que soit la méthode choisie, aurait fortement amputé les ressources des communes, EPCI et départements (le produit de l’Ifer radioélectrique est de 222 millions d’euros par an). Le gouvernement a donc choisi pour l’instant de remiser ce projet de réforme dans les tiroirs. Il faudra tout de même suivre le débat parlementaire de près pour voir si cette réforme, sortie par la porte, ne reviendra pas à cette occasion par la fenêtre.
L’AMF se réjouit également de « la hausse exceptionnelle de 350 millions d’euros de la Dsil » (dotation de soutien à l’investissement local), mais regrette que la répartition de celle-ci soit toujours « à la main des préfets » et « échappe complètement à la délibération des élus locaux ».
Enfin, l’AMF ne peut que se féliciter de l’abandon des contrats de Cahors, qui limitaient l’augmentation du budget de fonctionnement des collectivités à 1,2 % par an, sous peine de malus financier. Ce dispositif était « totalement contradictoire avec le souhait du gouvernement que les collectivités soient au rendez-vous de la relance », souligne l’association. Rappelons en effet que, même si les contrats de Cahors ne concernaient que les dépenses de fonctionnement, ils avaient tout de même une influence directe sur l’investissement : notamment parce qu’une augmentation des investissements amène mécaniquement une augmentation du budget de fonctionnement, un investissement générant entre 1 et 4 % de frais de fonctionnement Ces contrats étaient donc, en effet, un frein à l’investissement.
En dehors de ces trois points, l’AMF a également son lot de critiques pour le projet de loi de finances pour 2022, dont elle estime qu’il « renforce le pilotage des budgets locaux par l’État ». L’association rappelle que les allègements de fiscalité décidés par le gouvernement (taxe d’habitation, CVAE…) se sont traduits par « une perte de la maîtrise des recettes des collectivités locales pour 26,4 milliards d’euros par an ». Les mots sont choisis : l’association ne parle pas de baisse de ressources mais de « perte de maîtrise ». Ce qui était avant de l’impôt, dont les collectivités pouvaient librement décider les taux pour adapter le produit à la dépense, devient de la dotation, à la main de l’État.
L’AMF rappelle également que « les exonérations applicables aux logements sociaux sont compensées à moins de 12 % » dans ce texte, ce qui va générer « une perte annuelle de plus de 628 millions d’euros ».
L’AMF ne cesse de répéter – aux côtés des autres associations d’élus – que l’autofinancement est « le premier levier de l’investissement ». C’est surtout sur ce chapitre que le bât blesse dans le projet de loi de finances. C’est pourquoi l’AMF aligne un certain nombre de demandes pour soutenir l’autofinancement : la compensation « à l’euro près » des allègements fiscaux, exonérations et dégrèvements divers. L’association réclame « la compensation à l’euro près de la suppression de la TH avec la prise en compte des bases issues des avis d’imposition supplémentaires 2020 émis entre 2021 et 2023 ; la compensation des effets de la suppression de la TH pour les EPCI lorsque les mécanismes spécifiques à l’intercommunalité conduisent à des dysfonctionnements dans l’application de cette réforme ; la compensation à l’euro près des exonérations de foncier bâti, et la possibilité de supprimer l’exonération de TFPB applicable aux logements neufs, les communes ne pouvant plus limiter cette exonération en-deçà de 40 % depuis la suppression de la TH. » Enfin, elle demande que la hausse des plus bas salaires dans la fonction publique, récemment annoncée par la ministre Amélie de Montchalin et jugée « tout à fait bienvenue pour les agents », soit elle aussi compensée – afin que, pour reprendre une expression chère à André Laignel, le gouvernement ne fasse pas « des cadeaux avant l’argent des autres ».
Sur un plan plus technique, l’AMF met en avant plusieurs demandes concernant les recettes d’investissement, en particulier – ce qui là aussi est une position constante – « la réintégration des opérations d’acquisition et d’aménagement des terrains dans l’assiette du FCTVA » et « l’allègement des procédures d’attribution qui ralentissent la mise en œuvre des projets ». Si elle se félicite, on l’a dit, des 350 millions d’euros en plus sur la Dsil, l’AMF demande que cette enveloppe soir répartie entre Dsil et DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux), « sans fléchage exclusif sur les CRTE » (contrats de relance et de transition écologique).
Enfin, l’association réclame une fois encore l’abaissement du taux de TVA sur les transports collectifs à 5,5 %, estimant qu’il doit s’agir d’un produit de première nécessité.
La discussion en séance publique sur le projet de loi de finances pour 2022 commencera le lundi 11 octobre à l’Assemblée nationale.
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