Moins d’un an après avoir été déposée le 26 mai dernier au Sénat, la loi « renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux » a été promulguée et figure au Journal officiel de ce matin.
Ce texte d’une vingtaine d’articles a pour but à la fois d’aggraver les sanctions à l’encontre des auteurs de violences contre les élus et de renforcer la protection dont disposent ceux-ci, notamment la protection fonctionnelle.
Pour ce qui concerne l’arsenal répressif, la loi modifie le Code pénal pour ce qui concerne la dégradation des biens. La loi prévoyait déjà une peine renforcée pour ce délit lorsqu’il s’exerce contre une personne « dépositaire de l’autorité publique » ; la nouvelle loi y ajoute « ou chargée d’une mission de service public ».
L’article 3 du texte crée une peine de travail d’intérêt général en cas d’injure publique à l’encontre des élus. Le fait de commettre des injures à l’encontre du titulaire d’un mandat électif est désormais considéré comme « circonstance aggravante ». De même, devient une circonstance aggravante l’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif pendant la durée d’une campagne électorale, ou de la famille d’un candidat.
L’article 5 de la loi est l’un des plus importants : il met en place l’octroi automatique de la protection fonctionnelle de la commune aux maires victimes de violence, de menace ou d’outrage. Sont également protégés les élus « ayant reçu une délégation » ou suppléant le maire. Cette protection s’applique également lorsque les élus visés ont cessé leur fonction.
« L'élu bénéficie de la protection de la commune à l'expiration d'un délai de cinq jours francs à compter de la réception de sa demande par la commune s'il a été procédé, dans ce délai, à la transmission de la demande au représentant de l'État dans le département (…), ainsi qu’à l’information des membres du conseil municipal ». La protection peut être retirée, à l’inverse, par délibération motivée du conseil municipal, dans un délai de 4 mois à compter de la date à laquelle l’élu bénéficie de la protection de la commune.
Par ailleurs, les dépenses de protection fonctionnelle sont désormais considérées comme des dépenses obligatoires pour les communes (article 6). Lorsqu’un élu agit en tant que qu’agent de l’État, c’est à ce dernier d’assurer la protection fonctionnelle et d’en assumer le coût.
La loi assure également que la commune prend en charge « tout ou partie du reste à charge ou des dépassements d’honoraires résultant des dépenses liées aux soins médicaux et à l'assistance psychologique engagées par les bénéficiaires (de la protection fonctionnelle) ».
L’article 11 concerne l’assurance des risques liés à un mandat électif. Il vise à régler les situations dans lesquelles des assureurs refuseraient d’assurer les locaux utilisés par les élus (ou les candidats) comme permanence. Si un élu ou un candidat essuie au moins deux refus, il peut désormais « saisir un bureau central de tarification » qui « fixe le montant de la prime en contrepartie de laquelle l'entreprise d'assurance intéressée est tenue de garantir le risque ». Une fois cette décision prise, l’assureur qui maintiendrait son refus d’assurer le local se mettrait hors la loi et risquerait de se voir retirer son agrément.
Cet article entrera en vigueur le 22 mars 2025.
Le titre III de la loi concerne les relations des élus locaux avec « les acteurs judiciaires ».
La nouvelle loi modifie notamment l’article L132-3 du Code de la sécurité intérieur sur l’information du maire concernant suites judiciaires des infractions commises sur le territoire de sa commune. La loi prévoyait jusqu’à maintenant que le maire devait être informé « à sa demande » des classements sans suite ou, à l’inverse, des poursuites engagées. Le texte publié ce matin supprime les mots « à sa demande » : l’information sera donc désormais obligatoire et systématique.
Le texte prévoit également la possibilité de signer des conventions tripartites entre les associations départementales de l’AMF, les préfets et les procureurs, afin de prévoir « un protocole d'information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l'encontre des élus ». Cela se fait déjà dans certains départements, a-t-il été relevé pendant les débats parlementaires, et la nouvelle loi donne à cette démarche un cadre juridique.
L’article 15 prévoit que le procureur de la République a la possibilité de publier une communication « en lien avec les affaires de la commune » dans le bulletin municipal, « dans un espace réservé ».
L’article 16 redéfinit la composition des Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). D’une part, il dispose que le préfet doit désigner un « agent coordinateur au sein des services de l’État afin d’assister le maire dans l’animation du CLSPD ».
Par ailleurs, cet article définit la composition des CLSPD, qui n’était pas prévue jusqu’à présent dans le Code de la sécurité intérieure, qui disposait uniquement que dans les communes de plus de 5 000 habitants et dans les communes comprenant un quartier prioritaire, le maire doit créer un tel conseil, qu’il préside.
Les choses sont désormais plus claires. La nouvelle loi précise que sont membres de droit du CLSPD, outre le maire, le préfet et le procureur de la République ou leur représentant, ainsi que, le cas échéant, le président de l’EPCI « compétent en matière de dispositifs locaux de prévention de la délinquance et dont la commune est membre ».
Peuvent aussi être membres du conseil des représentants des services de l’État, désignés par le préfet, des parlementaires, à leur demande, des représentants d’associations et des personnes qualifiées.
La composition du CLSPD « est fixée par arrêté du maire ». Une réunion par an au minimum est obligatoire.
La loi précise que le maire, le préfet ou le procureur peuvent demander la création d’un « groupe thématique chargé des violences commises à l’encontre des élus ».
La nouvelle loi fixe également la composition des CISPD (conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance). À noter que la présence des maires des communes membres de l’EPCI n’est pas obligatoire, mais « à leur demande ».
Enfin, la loi prévoit, dans un délai de trois mois (donc d’ici à la fin du mois de juin), l’élaboration par le gouvernement de deux rapports. Le premier sur « l’opportunité d'élargir le bénéfice de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux, y compris ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives » ; le second « recensant les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs résultats ».
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