Si le plan Bayrou présenté cette semaine a vivement fait réagir notamment du côté des collectivités territoriales, les acteurs impliqués dans le développement de la politique sportive en France ont, eux aussi, eu de mauvaises surprises.
Peu après la prise de parole du Premier ministre, les comités olympique et paralympique français ont transmis à l’AFP un communiqué de presse dénonçant une « nouvelle coupe budgétaire » qui « marque un véritable abandon, à rebours de l’héritage des Jeux Olympiques et Paralympiques et des ambitions portées pour la jeunesse, la santé publique, l’inclusion et la cohésion nationale. »
Le cabinet de la ministre des Sports, Marie Barsacq, a en effet indiqué hier à l'AFP que la baisse des crédits envisagée pour les missions jeunesse et sport tournait aux alentours de 18 %.
Les comités admettent que « la situation budgétaire actuelle du pays impose un effort pour chaque secteur » mais insistent sur le fait que « le sport ne peut pas être traité avec autant de mépris ».
« Depuis le début de l’année, près de 300 millions d’euros ont déjà été rendus par le secteur, soit l’équivalent de près de la moitié de ses crédits budgétaires. Aucun autre domaine n’a subi une telle ponction », dénoncent les comités qui pointent une « injustice » allant « à contresens de l’envie de sport des Français, de la dynamique observée des prises de licences au lendemain des Jeux et de l’enthousiasme suscité par la perspective de l’organisation en France des Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver Alpes 2030 ».
« Le sport se retrouve donc être particulièrement touché sur deux années consécutives et ce alors qu’il ne représente que 0,10 % du budget de l’État, soit un montant très minime dans l’équation budgétaire du gouvernement », regrettent enfin les dirigeants des comités et notamment Amélie Oudéa-Castéra, ex-ministre des Sports et nouvelle présidente du comité olympique.
Cette annonce vient s’ajouter à d’autres coups portés au sport. En effet, pour la saison 2025-2026, le Pass’Sport sera uniquement ouvert aux jeunes de 14 à 17 ans révolus bénéficiant de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) ; aux jeunes en situation de handicap jusqu’à 30 ans (6 à 19 ans AEEH, 16 à 30 ans AAH) ; et enfin aux étudiants boursiers et bénéficiaires d’une aide annuelle du Crous de moins de 28 ans. Le spectre a donc été considérablement réduit au niveau des jeunes qui reçoivent l’ARS (avant de 6 à 17 ans) ce qui représente un changement majeur alors que plusieurs acteurs souhaitaient que tous les jeunes puissent être éligibles au Pass’Sport.
L’association Ville & banlieue a adressé une lettre ouverte au Premier ministre sur ce sujet. Signée par plus d’une centaine d’élus qui font part à François Bayrou de leur « profonde désapprobation envers cette mesure meurtriere pour l’acces au sport », la lettre rappelle l’importance du Pass’Sport dans les territoires. « Dans nos villes, dans la ruralité, dans nos banlieues, la création du Pass’Sport et la vague sportive des JOP ont fait exploser le nombre d’inscrits dans nos clubs. Le Pass Sport a donné un coup d’arrêt a la discrimination financière dans l’accès au sport. Il a permis un boom d’inscriptions sportives des jeunes filles ! Dans les familles nombreuses, il a permis qu’on cesse de privilégier le sport pour un enfant au détriment d’un autre. » Les élus demandent le rétablissement du Pass’Sport pour les 6-13 ans.
Comme si cela ne suffisait pas, une autre actualité concernant le financement du sport a réveillé l’inquiétude des élus. Pour répondre aux enjeux budgétaires, le Plan 5000 Équipements - Génération 2024 a été révisé de 98 à 75 millions d’euros avec une réduction de 13 millions sur les équipements structurants et 10 millions sur les équipements de proximité. En conseil d’administration de l’ANS, le collège des collectivités s’est ému de ce coup de rabot qui déstabilise lourdement la situation financière de l’Agence.
« C’est une série de mesures négatives que Bercy impose au ministère des Sports, confiait récemment à Maire info David Lazarus, vice-président de l'Agence Nationale du Sport et coprésident de la commission Sport de l’AMF. Bercy ne tient pas compte de la situation post olympique et c’est un signe particulièrement négatif. »
Au-delà de ces irritants financiers, l’Agence nationale du sport (ANS) risque même d’être à nouveau remise en cause. Lors des discussions autour du projet de loi de finances pour 2025, il avait largement été question de redéfinir le cadre d’intervention de l’ANS en lui retirant notamment la gestion des financements accordés aux collectivités territoriales, pour la recentrer sur le sport de haut niveau. En mai dernier, le Premier ministre a chargé le député de la Saône-et-Loire Benjamin Dirx d'une « mission temporaire ayant pour objet l'évaluation et l'optimisation des moyens alloués à la politique publique du sport ». Si les conclusions n’ont pas encore été présentées, David Lazarus rappelle qu’il est essentiel que l’action de l’ANS en direction des collectivités soit pérennisée et souligne que l’Agence parvient à mettre autour de la table l’ensemble des acteurs du sport, dont le monde économique, et peut être un outil efficace pour davantage mobiliser les financements privés dans le contexte de réduction nécessaire de la dépense publique.
Le Premier ministre, mardi, a confirmé la volonté du gouvernement de fermer plusieurs agences, sans préciser celles qui seront visées. L'ANS est-elle dans le collimateur ? Le récent rapport d'enquête parlementaire sur les agences et les opérateurs de l'État, en tout cas, (lire Maire info du 7 juillet) préconise bien la suppression de l'ANS, tout comme celle de l'Anru ou de l'ANCT.
Lucile Bonnin pour Maire-info, article publié le 18 juillet 2025.
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