« Il ne faudrait pas que la lumière s’éteigne après le 1er octobre 2024 » ! Cette crainte, exprimée notamment par David Lazarus, maire de Chambly (60) et co-président de la commission Sports et JOP2024 de l’AMF, le 24 novembre, lors du point info consacré au sport au 104e Congrès des maires, semble partagée par un certain nombre d’élus locaux.
La raison ? Le gouvernement a augmenté les crédits consacrés au sport avant les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 (JOP2024), mais envisage de les réduire ensuite. Or le bloc communal porte «86% des projets » pour les équipements sportifs, a rappelé David Lazarus. Les élus s’inquiètent de voir les moyens de l’Agence nationale du sport (ANS) baisser.
Autre élément de crainte : la gouvernance territoriale du sport, incarnée par les conférences régionales du sport (CRdS) et les conférences des financeurs qui sont les déclinaisons territoriales de l’ANS, n’a pas encore donné tout son potentiel. Les collectivités locales en sont parties prenantes. Mais cette gouvernance territoriale «ne sera que ce que nous en ferons. Si on ne tape pas du poing sur la table, ce sont les Drajes* et les préfets qui vont décider à notre place » [des investissements], a averti le maire de Chambly, soutenu par ses pairs.
Gilles Leproust, maire d’Allonnes (72), membre de la CRdS Pays de la Loire, propose de mettre en place «des allers-retours » entre les élus présents dans ces instances territoriales et les associations départementales de maires pour «qu’on se sentent moins isolés lorsque l’on représente les collectivités ». Pour sa part, Noëlle Chenot, vice-présidente du Golfe de Morbihan Vannes Agglomération, et maire de Surzur (56) et représentante de l’AMF au sein de la CRdS Bretagne, constate, un peu amèrement, qu’il est «difficile de motiver les acteurs locaux du monde sportif, du monde économique, les élus » pour intégrer cette gouvernance territoriale du sport.
Or, le sport de haut niveau ne peut pas être performant sans le sport local, les équipements, associations et clubs locaux, soutenus par les collectivités, ont souligné plusieurs maires, à l’instar de Marcellin Chingan, adjoint au maire du Moule (97) et représentant l’AMF au sein de la CRdS Guadeloupe : «La Guadeloupe est une terre de champions, mais nous avons 25 ans de retard sur nos infrastructures sportives. 90% de nos communes sont en difficultés financières. Nous rencontrons des problèmes d’ingénierie pour monter nos dossiers de demandes de subventions. La Drajes ne nous dit pas qu’il manque une pièce et au final l’ANS refuse notre dossier », déplore l’élu ultramarin.
Autre témoignage d’une élue du Lamentin (97) : «Je ne suis pas une élue professionnelle. La conférence régionale du sport, la conférence des financeurs me tombent dessus. Je ne connais pas. S’il vous plaît, aidez-moi. »
Difficile en effet de se retrouver dans le dédale des demandes de subventions, ce qui poussent beaucoup d’élus à réclamer une «guichet unique ». Seulement, cette piste gêne le principe de libre administration des collectivités, selon David Lazarus, car il obligerait toutes les collectivités à financer des projets parce que d’autres l’ont décidé. Vincent Saulnier, secrétaire général de l’Andes (Association nationale des élus en charge du sport), adjoint au maire de Château-Gontier sur Mayenne (53), estime qu’il faudrait «sortir de cette logique de guichet pour aller vers une logique de projets ».
Troisième complication : l’envolée des prix de l’énergie. «J’ai peur que nous fermions des équipements sportifs communaux à cause du coût des fluides et que peu à peu nous n’ayons plus que des équipements sportifs intercommunaux. La priorité, c’est de faire un état des lieux des équipements énergivores pour [rénover] et que les activités sportives puissent perdurer car c’est le seul lien social dans certains endroits », martèle Sylvie Miceli-Houdais, maire de Rognac (13), co-présidente de la commission sports de l’AMF et membre de la CRdS Provence-Alpes-Côte-D’azur.
David Lazarus réclame qu’une partie (200 millions d’euros) du Fonds vert (2 milliards d’euros pour la transition écologique dans les collectivités) soit fléché vers les équipements sportifs. «Sinon, tout ira vers les écoles, les Ehpad… », craint-il.
« Le sport peut financer le sport car il rapporte plus de deux milliards d’euros à travers différentes taxes », estime Vincent Saulnier. «Il faut chercher des partenariats, notamment auprès des clubs sportifs à qui nous mettons gratuitement à disposition nos équipements, mais qui nous oublient quand ils remportent des compétitions. Il doit y avoir une prise de conscience ! », tonne Sylvie Miceli-Houdais.
« Attention également à ne pas être autocentré, alerte Mohamed Gnabaly, maire de L’Île-Saint-Denis (93), co-président de la commission sports et Jeux olympiques et paralympiques de 2024 de l’AMF. L’enjeu, c’est quels équipements pour quelle échelle, quel bassin de vie, quelle intercommunalité, etc. » Mohamed Gnabaly rappelle aussi au passage que sa «priorité, ce ne sont pas les JO sur L’Île-Saint-Denis, mais le service public du sport pour que les jeunes, les séniors, toute la population puissent continuer à faire du sport ! »
Quatrième co-président de la commission Sports et JOP2024, Joffrey Zbierski, maire de Provin (59) et membre de la CRdS Hauts-de-France acquiesce : «Il faut faire le forcing auprès de la ministre des Sports pour avoir une véritable politique sportive et pour laquelle les JO constitueront un début ! »
* Délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports.
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