
près le décès du maire de Signes (83), Jean-Mathieu Michel, le 5 août 2019, le Sénat avait lancé, avec l’AMF, une consultation auprès des maires afin de prendre la mesure des incivilités, menaces, agressions physiques auxquelles ils ont à faire face. Résultat : 82% ont subi des incivilités, 48% des menaces et 14% des agressions. Seules 21% des plaintes déposées ont abouti à la condamnation pénale des fautifs. Résultat : une perte de confiance envers la justice. Le tableau ainsi posé a ouvert le forum du Congrès des maires consacré, le 19 novembre, à « L’engagement des maires pour la protection de leurs concitoyens à travers l’exercice de leurs pouvoirs de police et leur rôle en matière de préventions ».
Alors que désormais « on vient tuer sur l’espace public, on y commet des attentats », que « les comportements sont de plus en plus intolérants, violents, irrespectueux », maires et Etat ne peuvent agir chacun de leur côté, a affirmé en introduction des débats Christian Estrosi, maire de Nice (06), président de la Commission consultative des polices municipales et co-président du Forum. Malgré les menaces de mort régulièrement reçues, le maire ne demande pas de protection : « Il faut en demander plus pour les citoyens ».
Le monde rural n’est pas épargné. Problèmes de voisinages, violences scolaires, démarchage frauduleux après des personnes âgées, installation illicite de gens du voyage… sollicitent la gendarmerie, rappelle Kevin Dewaële, maire de Vignats (14). La montée des incivilités et des dégradations, « sur fond de délinquance », est aussi constatée par Nathalie Koenders, co-présidente du forum, adjointe au maire et vice-présidente de la métropole de Dijon (21). « Les maires se sentent seuls, même s’ils ont une police municipale ».
C’est l’un des points focaux du débat : alors que les relations entre polices municipales et nationales sont bonnes, les élus s’inquiètent du flou de la frontière entre maintien de la sécurité, prérogative régalienne, et préservation de la tranquillité publique, compétence communale. « Les citoyens sont demandeurs d’effectifs de police », rapporte Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin (69), qui, depuis 2017, a fait passer ceux de la police municipale de 3 à 32 agents, patrouillant la nuit, avec brigade cynophile et brigade motorisée, pour un budget de fonctionnement passé de 1 million à 3 millions d’euros.
Répartition des tâches
Reproche classique des élus : l’investissement dans les polices municipales ne pousse pas l’Etat à augmenter ses effectifs. « Comment répartir les tâches avec la police nationale qui n’a pas encore ses pleins effectifs ? », se demande Hélène Geoffroy. De façon plus générale, une évolution inquiète Nathalie Koenders : celle qui voit l’Etat baisser les effectifs de la police nationale et reprendre la main sur la police municipale. L’adjointe s’alarme de voir que, dans le cadre des travaux sur le futur Livre blanc sur la sécurité intérieure, il serait proposé que la police municipale soit armée a priori et qu’il reviendrait au maire de décider de ne pas l’armer.
La région Ile-de-France, a choisi d’agir en aidant les acteurs de la sécurité, bien que celle-ci ne fasse pas partie de ses compétences. Frédéric Péchenard, vice-président du conseil régional chargé de la sécurité et de l’aide aux victimes, ancien directeur général de la Police nationale, détaille : conventions pour la rénovation des casernes de gendarmerie et des commissariats, et « bouclier sécurité » permettant d’aider à l’investissement en faveur des polices municipales et d’améliorer la sécurité des espaces publics.